Une quinzaine de personnes travaillent au centre R&D d’Hyperloop dans la tour de contrôle de l’ancienne base aérienne de Toulouse-Francazal. Le tube de 320 mètres de long attend sa capsule, cachée tout près, pour les premiers tests.

Mais que se passe-t-il derrière les murs de l’ex-aérodrome de Toulouse-Francazal ? La Dépêche du Midi lève un coin du voile. La zone est dédiée en priorité aux mobilités du futur avec Easymile, la navette autonome, la maintenance de l’avionneur ATR, des drones, un projet de piste pour véhicules autonomes des constructeurs auto français, et donc Hyperloop Transportation Technologies (HTT).

La start-up californienne pilotée par Dirk Albhorn et Bebop Gresta, a implanté en 2018 son centre de recherche et développement (R&D) européen à Toulouse-Francazal. Une quinzaine de personnes travaille aujourd’hui dans les bureaux de l’ancien commandement de la base aérienne, dans la tour de contrôle.

 

Tube d’acier boulonné et soudé, mis sous basse pression

On devine, depuis la route qui longe l’aérodrome depuis Cugnaux (avenue du Général Barès ou D924a), le tube d’acier de 320 mètres de long qui vient d’être assemblé. Vont s’y dérouler les premiers essais grandeur nature, à l’échelle 1, du ”transport du futur » imaginé par la firme californienne. 16 tubes de 20 mètres de long fabriqués en Espagne, pesant chacun 30 tonnes, ont été minutieusement boulonnés et soudés entre eux pour dessiner un curieux trait de métal. Le boulonnage assure la solidité de l’ensemble et la soudure, selon un procédé spécial, garantit l’étanchéité parfaite du tube. Au pied de celui-ci, une station de pompage qui ressemble à un énorme climatiseur, avec ses batteries électriques, de la taille d’un container, relié par une canalisation au tube, est destinée à aspirer l’air à l’intérieur afin d’y créer une basse pression.

Station de pompage tous les 10 km.

Lorsque l’Hyperloop sera opérationnel, peut-être entre Toulouse et Montpellier, ou plus probablement, pour commencer, quelque part dans le désert de Dubaï, un groupe de dix stations de pompage sera disposé tous les 10 km, le long du tube, afin de garantir la basse pression à l’intérieur. Le principe de fonctionnement du train à gravitation magnétique imaginé par Hyperloop repose en effet sur l’absence de résistance de l’air qui autorise une vitesse jamais atteinte par un transport collectif au sol, 1200 km/h maxi. HTT, modeste au départ, envisage de faire circuler ses premières capsules à seulement (!) 750 km/h. Mais elles pourront à terme atteindre la vitesse supersonique (il n’y a pas de mur du son au sol, sans résistance de l’air). La capsule est mue par la force électromagnétique. Des panneaux solaires implantés tout le long du tube permettront de produire l’électricité nécessaire à l’alimentation du transport du futur.

Bientôt, une piste plus longue

Non loin de là, la capsule de métal, usinée elle aussi en Espagne, arrivée à Toulouse en janvier dernier, est cachée, à l’abri des regards indiscrets, dans l’enceinte de la base aérienne qui a vu décoller autrefois les aéronefs de l’Aéropostale. Ce drôle d’objet oblong, totalement aveugle, presque entièrement construit à partir d’un matériau composite intelligent spécialement conçu par HyperloopTT baptisé Vibranium, attend d’être introduit à l’intérieur du tube pour y être testé. HTT, qui ne souhaite pas communiquer sur ce sujet top secret, ne donne pas de date.

La capsule a été fabriquée dans un matériau composite spécial par HTT – Photo DR

Les premiers tests seront réalisés très vite, sans doute d’ici la fin 2019. Il ne s’agira pas d’essais de vitesse  le tube d’essai de 320 mètres de long ne permet pas d’atteindre une vitesse importante – mais de vérifier à l’échelle 1 le fonctionnement du système modélisé sur les ordinateurs d’Hyperloop.

Une piste plus longue va être construite ultérieurement sur la voie royale de l’ex base aérienne. La dépollution du site a maintenant été effectuée. Le tube d’acier d’un km de long sera posé sur des pylônes, à 5,80 m au-dessus du sol, ce qui laissera passer les camions dessous, notamment les camions de pompiers anti-incendie de la base. La piste de 320 mètres a été posée sur des plots de béton, mais le tube d’un km sera, lui, sur des pylônes plus légers et discrets, ancrés au sol par des fondations. Le transport du futur s’appuiera alors sur un dispositif complet pour être testé à échelle réelle.

Vers un Labège/Saint-Jean-de-Védas ?

« C’est long de monter un écosystème, créer une filière comme celle des mobilités du futur que nous souhaitons à Francazal ne se fait pas en un jour, il faut se montrer patient”, déclare Dominique Faure, élue chargée du dossier de la zone économique de Francazal pour Toulouse-Métropole.

« Le centre de R&D d’HTT est bien là. Leur travail avance. Des emplois ont été créés sur place par cette société avec uniquement ses fonds privés. La collectivité met seulement à disposition des locaux et de l’espace. Il s’agit là d’un transport expérimental mais porteur d’espoir, car fondé sur des procédés très connus en matière de transport ferroviaire ou aérien. D’après les informations que j’ai pu obtenir, HTT souhaite très vite arriver à des résultats concrets, dans un délai inférieur à une dizaine d’années. Ils suivent un cahier des charges très précis, qui a été validé par Tuv-Sud, le bureau européen spécialisé dans les transports auquel les pays s’adressent avant de certifier les nouveaux modes éventuels de transport sur leurs territoires »

. Toujours selon les informations glanées par la vice-présidente de Toulouse Métropole en charge du développement économique et de l’aménagement des zones d’activités économiques, une étude de faisabilité pourrait être très rapidement réalisée par les ingénieurs et techniciens d’Hyperloop Transportation Technologie, étude pilotée par le centre de R&D de Toulouse-Francazal, sur un projet d’Hyperloop reliant Toulouse, capitale régionale à Montpellier, autre métropole majeure d’Occitanie. A condition que la Région le demande à HTT, comme il en a déjà été question lors de l’annonce de la venue du centre de R&D d’HTT à Toulouse, dès 2017.

La maire de Saint-Orens verrait bien un Hyperloop reliant, en 25’, le terminus de la 3e ligne, Labège-La Cadène gare, à Saint-Jean-de-Vedas, dans la banlieue de Montpellier. HTT a déjà réalisé une douzaine d’études de faisabilité dans le monde. Parmi les nombreux projets évoqués pour la réalisation d’une première ligne Hyperloop, celui de Dubai semble le plus avancé et prometteur, surtout au regard de la facilité de construction dans un espace plutôt désertique.

Made in Toulouse

Une quinzaine de personnes travaille au centre de R&D de Francazal et plusieurs dizaines de contributeurs indépendants sont associées à leurs travaux, aux Etats-Unis et ailleurs dans le monde. Mais Dominique Faure aimerait bien, si l’expérience Hyperloop se révèle positive, que Toulouse participe, pourquoi pas, à la fabrication d’éléments du transport du futur.

Tubes et capsule ont été produits en Espagne mais la région possède les compétences de pointe pour prendre le relais.