INTERAVIA – Mai 1970 : L’organisation des services après-vente pour les moteurs de Concorde

Rolls-Royce et la SNECMA ont constitué une filiale commune, la ”Concorde Engines Support Organisation Ltd » (CESO), chargée, pour le compte des deux sociétés mères, de négocier et de gérer des contrats de fournitures de moteurs, livrés montés ou en rechange, de pièces détachées et des services relatifs au TSS Concorde qui les accompagnent. La CESO établira un programme de services après-vente pour ces moteurs, et facilitera aux utilisateurs le contact avec les cadres responsables de Rolls-Royce, de la SNECMA et des principaux fournisseurs d’accessoires. Elle dispose d’un personnel permanent restreint, composé de cadres, réparti entre Bristol et Paris, chargé d’organiser, de coordonner et de normaliser les interventions des services intéressés dans les deux sociétés au bénéfice des exploitants.

Suivant les accords conclu entre les gouvernements français et britannique, relatifs à la fabrication de l’Olympus, les pouvoirs de décision et la responsabilité technique concernant le réacteur proprement dit relèvent de Bristol, et ceux en rapport avec le canal d’éjection, de la SNECMA. Afin de réaliser une production en série équilibrée et rentable, il y aura intégration totale des chaînes de fabrication de l’Olympus 593, Bristol construisant à peu près 75% du réacteur proprement dit, et la SNECMA, environ 25% du réacteur et tout le canal d’éjection.

Le Rolls-Royce/SNECMA Olympus 593, dont la société Concorde Engine Support Organisation Ltd, a la responsabilité.

Détermination progressive des intervalles entre révisions

L’Olympus 593 et son canal d’éjection sont conçus et mis au point de manière à ce que l’on puisse utiliser des techniques d’entretien selon l’état. Pour leur permettre de prendre effet assez tôt, des calendriers d’entretien seront établis en étroite collaboration avec les utilisateurs et les organismes responsables de l’homologation. Une fois que l’Olympus sera en service, le programme de vérification par sondages pourra sans doute débuter après 700 heures de fonctionnement : ce type de réacteur aura, à ce stade, accumulé environ 30.000 heures de fonctionnement, dont 12.000 heures au banc et 18.000 heures d’essais en vol. On espère, grâce à la collaboration avec les principaux utilisateurs, pouvoir mettre au point un programme visant à accroître la durée de vie du moteur. Les intervalles entre déposes successives et le calendrier initial des vérifications seront comparables, estime-t-on, à ceux des réacteurs commerciaux subsoniques actuels, au même stade de mise au point, et après la même expérience de fonctionnement.

Durée de vie des éléments

Dans la conception des éléments importants de l’Olympus et de son canal d’éjection, on a recherché une grande fiabilité et une longue durée d’utilisation. On s’est attaché à obtenir, pour les principaux sous-ensembles du réacteur, une durée de vie théorique de 75.000 heures, soit 25.000 traversées transatlantiques. Toutefois, les aubes de turbine doivent être remplacées toutes les 10.000 heures. Avant la
mise en service, le programme des essais d’endurance aura confirmé les prévisions initiales de durée de toutes les parties vitales, et des essais de rupture auront permis de vérifier la résistance aux contraintes. Les principaux éléments du canal d’éjection ont une durée de vie théorique de 30.000 heures, à l’exception de l’inverseur de poussée et du silencieux, qui doivent être remplacés après 25.000 et 20.000 heures de fonctionnement, respectivement.

Service après-vente pour les moteurs de rechange

Une assistance sera fournie aux exploitants, s’ils le demandent, en matière de planification de leurs stocks de moteurs de rechange. Il peut être nécessaire, en particulier au début de l’exploitation, de disposer temporairement d’un certain nombre de moteurs de rechange en plus du lot normal. Les dispositions suivantes sont prises dans ce but :
● Vente avec option de rachat. Des moteurs supplémentaires seront vendus à un utilisateur avec option de rachat par CESO à un prix fixé. Cette option reste en vigueur jusqu’à ce que les moteurs de l’utilisateur, dans leur totalité, aient atteint un potentiel officiellement approuvé de 3000 heures, ou pendant une période équivalente pour l’utilisateur qui aura adopté le programme d’entretien selon l’état pourvu qu’il satisfasse aux conditions ci-dessous.

Fourniture de pièces de rechange

● Stocks de pièces de rechange. Les pièces de rechange pourront être délivrées par Bristol ou par Paris, et seront également gardées en dépôt en d’autres centres importants dont les emplacements, par exemple en Amérique du Nord, seront choisis après consultation des utilisateurs. Le système d’approvisionnement de Rolls-Royce et de la SNECMA emploie le traitement électronique de l’information le plus moderne, comportant un tableau complet de l’inventaire et des livraisons, suivant des méthodes élaborées, des pièces commandées. La récapitulation automatique est effectuée tous les trois mois pour chaque pièce.
● Délais de livraison. Les stocks permettront de livrer les pièces de rechange 9 jours à l’avance, cependant que l’approvisionnement initial sera effectué aux utilisateurs six mois avant la réception de leur premier appareil, à condition que les commandes soient reçues à temps. Un service pour répondre aux exigences de réparations urgentes fonctionnera 24 heures sur 24h et sept jours par semaine.
● Eléments importants. Les éléments principaux tels que carters, disques de turbines et arbres seront conservés à un niveau de stock convenable et pourront être obtenus en urgence par un utilisateur, pourvu qu’il ait commandé et entretenu le lot de pièces de rechange recommandé.
● Spécifications ATA. Ces spécifications ATA, qui portent sur l’approvisionnement initial, la facturation et les renseignements de consommation, seront observées dans la mesure où le souhaiteront les utilisateurs. L’emballage de toutes les pièces détachées sera conforme à ces spécifications.

Entretien, réparations et révisions

● Coûts et heures de main-d’oeuvre. Le coût du travail d’entretien régulier devrait être estimé à raison de 10 minutes de main-d’oeuvre par heure de fonctionnement du réacteur.
● Coûts des pièces de rechange. Le coût moyen des pièces Rolls-Royce/SNECMA, utilisées pour l’entretien et les révisions, ne devraient pas dépasser 6% du prix de vente du réacteur par 1000 heures de fonctionnement.
● Travail de révision. On estime actuellement que 1180 heures de main-d’oeuvre seront nécessaires pour la révision (démontage, contrôle, montage et essais) du réacteur proprement dit, et 550 heures de main-d’oeuvre pour celle du canal d’éjection.

Assistance technique

● Entretien. Des instruments et des techniques d’inspection sont, continuellement mis au point et perfectionnées par Rolls-Royce et la SNECMA. L’endoscope permet l’inspection visuelle des éléments internes sans démontage du réacteur, grâce à 25 points se visite judicieusement répartis.
● Contrôle radiographique. On a prévu de faire passer des isotopes radioactifs par le centre du réacteur. Cela permettra de procéder à des examens radiographiques des principaux sous-ensembles, sans démontage du moteur.


L’utilisation d’endoscopes et d’isotopes pour l’entretien de l’Olympus 593. La zone ombrée représente les pièces accessibles à l’endoscope par les points repérés par des flèches. On peut également procéder à l’examen du moteur en introduisant des isotopes radioactifs à travers l’arbre central (ligne pointillée).
● Détecteurs magnétiques de limaille. Toutes les canalisations de vidange des paliers du réacteur en ont été pourvues : cela permet de détecter les défaillances possibles des paliers avant qu’elles n’atteignent des proportions graves. Les détecteurs sont situés de manière à permettre une inspection immédiate.
● Réparations. L’évaluation détaillée des besoins en réparations des sous-ensembles a été communiquée aux compagnies aériennes ; des plans complets de réparation seront à leur disposition avant la mise en service du réacteur.
● Révisions. Les révisions du réacteur et de ses éléments s’effectueront selon les procédures normalisées. Des outils spéciaux, des dispositifs de levage et des équipements de réparation et d’inspection, nécessaires à l’entretien et à la révision des moteurs, sont actuellement mis au point. Les exemplaires déjà distribués seront mis à jour régulièrement jusqu’à la publication (au moins 18 mois avant la livraison du premier appareil) du manuel définitif d’organisation de centre technique et des manuels de révision.
En outre, les utilisateurs qui désirent monter ou adapter des installations de révision ou de réparation recevront des conseils techniques pouvant aller jusqu’à l’attribution des plans – sur microfilms ou sur papier – qui permettent de fabriquer l’outillage ou les équipements nécessaires. Aux exploitants qui ne disposeraient pas d’installations locales ou qui leur soient propres, Rolls-Royce/SNECMA proposeront d’organiser un service de réparations majeures et de révisions pour le réacteur complet ou ses sous-ensembles.
● Transport du réacteur. L’Olympus 593 peut être facilement transporté dans la soute à fret d’un avion commercial à grande capacité ou à bord des avions-cargos actuels, long ou moyen-courriers. En alternative, on a déjà établi le projet de monter le réacteur en nacelle en 5ème position sur les long-courriers actuels.

Centralisations des informations

Rolls-Royce et la SNECMA enregistreront par calculateur, toutes les informations significatives se rapportant aux performances du réacteur et à sa sûreté de fonctionnement, qui pourront donc être communiquées sur demande aux utilisateurs. Cet enregistrement sera conforme à la spécification 200 de l’ATA.
Un réseau de transmission des informations sera créé pour permettre de prendre des mesures immédiates dès qu’un problème d’entretien ou de sûreté de fonctionnement aura été résolu. La réalisation d’un système d’enregistrement des informations, spécial à l’Amérique du Nord, sera l’objet de soins attentifs. Rolls-Royce et la SNECMA échangent de manière rapide et sûre les informations relatives aux essais de l’Olympus 593 par des liaisons privées à grande vitesse.

Publications techniques

Les publications suivantes ont été déjà adressées aux compagnies aériennes ; notice provisoire d’entretien et notice provisoire de révision de l’Olympus 593. L’éventail complet des publications techniques et des manuels,
permettant de faire face aux besoins courants, sera fourni gratuitement. Toute la documentation et le service de mise à jour, destinés à aider les utilisateurs, seront conformes aux spécifications ATA 100 et 101. En outre, un manuel d’organisation d’atelier de réparation sera publié : avec son aide, les utilisateurs pourront adapter les installations existantes ou en disposer de nouvelles.
Figure 1 : le temps de remplacement d’un moteur est pour l’Olympus 593, de 5 heures 30 minutes ; la dépose prend 1 heure 30 minutes ; la mise en place du nouveau moteur 40 minutes et le raccordement 1 heure 30 minutes ; la mise au point pour le vol, 1 heure 50 minutes complète l’opération. Figure 2 : dépose du système de postcombustion et des parties arrière du réacteur.


Formation du personnel

Rolls-Royce et la SNECMA entretiendront à Bristol un centre principal d’instruction pour l’Olympus 593, chaque société mettant à la disposition de la clientèle des instructeurs expérimentés. Parmi les moyens d’enseignement les plus modernes qui y seront employés, un simulateur électronique de fonctionnement du réacteur permettra de reproduire le fonctionnement de toutes les commandes du groupe propulseur et d’introduire les défaillances caractéristiques. Des stages seront offerts gratuitement, concernant le moteur, ses circuits et accessoires, sa mise en oeuvre, son entretien et sa révision.

Assistance technique chez le client

Bien avant la mise en service du moteur, des spécialistes du service après-vente des deux sociétés seront envoyés pour en organiser l’entretien. Les compagnies aériennes seront invitées à se grouper en vue d’une planification efficace des services d’entretien. Avant la livraison des appareils, des techniciens d’entretien expérimentés seront affectés à chacune des bases d’exploitation et d’entretien ; ils y assureront un service permanent et aideront à rechercher les causes de panne et les méthodes de remise en état. Des conseils seront également donnés concernant la formation sur place à l’emploi des équipements de vérification, le contrôle des stocks de rechanges, etc.
Chaque équipe sera en contact permanent avec un centre de service après-vente, afin d’être en mesure, le cas échéant, de résoudre rapidement les problèmes particuliers et de contribuer à l’extension progressive des nouvelles méthodes de travail. Enfin, les deux sociétés emploieront sur place des spécialistes des réparations, dont les compétences s’étendront à tous les aspects du démontage et du remontage, de l’inspection, du remplacement par sous-ensembles et des essais.