Nos usines de Toulouse ont reçu de nombreuses personnalités parmi lesquelles :
Le 23 janvier, 21 représentants des compagnies clientes de Concorde qui se sont réunis à Toulouse du 21 au 23 janvier pour assister au meeting concernant les « Approvisionnements Initiaux de Concorde”.

Les essais en vol de Concorde

Le programme des essais en vol de Concorde qui s’étend sur plus de trois ans, met en oeuvre sept avions : les prototypes, les avions de présérie et les trois premiers avions de série qui totaliseront ensemble près de 4500 heures de vol.
Le programme comporte trois phases répondant chacune à un objectif défini :
La mise au point (1200 heures) qui concerne essentiellement les prototypes et les avions de présérie et qui a pour objet de contrôler l’exactitude des prévisions de calcul, de définir les meilleurs réglages de l’avion et de ses équipements et d’en obtenir les meilleures performances.
Les vols de certification proprement dits (750 heures) ayant pour but de montrer que la sécurité et la fiabilité de l’avion justifient son affectation au transport des passagers.
Les vols d’endurance (1500 heures) destinés à montrer que l’avion est capable de satisfaire à toutes les exigences opérationnelles.

Enfin 200 heures d’essais supplémentaires sont prévues pour la certification du système d’atterrissage automatique et pour les opérations effectuées à partir de terrains situés à haute altitude.

Programme d’essais en vol des prototypes

Les deux prototypes sont pratiquement identiques, et sont équipés des mêmes installations d’essais, à l’exception des appareillages d’essais de vibrations. Ceux-ci n’existent que sur le premier prototype, la structure du second avion étant toutefois aménagée en prévision de leur montage.
Ainsi le 001, équipé pour les essais de vibrations, sera chargé de l’exploration du domaine de vol et de la plupart des essais de qualités de vol de l’avion, de l’étude du pilote automatique et du système de navigation.
De son côté le second prototype sera affecté en priorité aux essais des groupes propulseurs, des circuits électriques et du système d’alimentation de carburant, et à la mesure des performances.
Les essais des prototypes comprendront sept phases successives pour l’exploration complète du domaine de vol depuis les basses vitesses jusqu’à la croisière à Mach 2.
La phase zéro, qui s’étend des premiers essais de réacteurs au point fixe, jusqu’au premier vol, a été consacrée aux essais de roulage dans toutes les manoeuvres au sol.
La phase une, est constituée par les premiers vols de contrôle général. Le premier vol du prototype 001 s’effectuera en configuration fixe, à une vitesse maximale de 250 noeuds, et jusqu’à une altitude maximale de 15.000 pieds.

Pendant cette courte sortie, on procèdera en altitude à l’exploration des comportements de l’appareil en configuration d’approche, avant d’effectuer la manoeuvre réelle d’atterrissage.
Les vols suivants comporteront des manoeuvres de train, du nez basculant et des aérofreins et de légères variations de centrage. La maniabilité sans auto stabilisation des commandes sera contrôlée. Parallèlement, par des études sur simulateur on recherchera l’optimisation des divers systèmes.
La seconde phase est celle des essais de vibrations jusqu’à la vitesse de Mach 0,93.
Ensuite sera étudié le domaine transsonique de Mach 0,93 à Mach 1,3, vitesse à laquelle la régulation des entrées d’air entre en action. Il est très important de connaître les qualités de vol dans ce domaine ou interviennent des variations de centrage par transfert de carburant. On procèdera aussi aux premières mesures de l’intensité du bang sonique.

La quatrième phase est destinée à l’étude du domaine de vol en régime supersonique jusqu’à Mach 2 L’avion 001, ouvrira le domaine au point de vue de la maniabilité et des phénomènes d’aéroélasticité tandis que l’avion 002 procèdera, aux régimes déjà explorés, à des études plus détaillées des propulseurs et des performances.
La cinquième phase se poursuivra jusqu’à la réalisation de vols en régime de croisière à Mach 2 pendant au moins trente minutes, pour une première évaluation de la consommation spécifique.
Au cours de cette phase finale de mise au point des prototypes on procédera à l’exploration des fortes incidences et à la mesure des performances de décollage et d’atterrissage conformément aux règlements TSS.

Circuits des essais en vol

Equipements d’essais embarqués

Pour Concorde, les paramètres à étudier sont quatre à cinq fois plus nombreux que pour les avions subsoniques et leur diversité impose un choix difficile des procédés à mettre en oeuvre pour les contrôles.
Au total, 3000 paramètres doivent être suivis. L’installation de bord permet leur enregistrement, sous forme numérique à raison de 9000 mesures par seconde pour les 5/6 d’entre eux et pour les autres, sous forme analogique (oscillographique ou magnétique).
Les plus importants sont par ailleurs, enregistrés à raison de 375 mesures par seconde, sur un enregistreur d’accident.

Installation électronique d’essais à borde de Concorde

Poste des ingénieurs navigants

Pour les paramètres qui sont l’objet d’une surveillance continue au cours des vols, le poste des ingénieurs navigants, groupe 340 indications continues, 71 voyants et 2 enregistreurs graphiques. De la place a été économisée, lorsque cela était possible, par commutation de mesures sur un même instrument ou par l’emploi d’indicateurs multiples à échelle linéaire.
La complexité de ce poste impose d’en répartir la surveillance entre trois ingénieurs dont le premier est chargé de suivre les informations relatives aux qualités de vol, aux performances et aux systèmes de commandes de vol tandis que le second surveille le conditionnement d’air, l’installation électrique et les circuits de carburant et que le troisième contrôle les moteurs et systèmes associés.
Enfin, il a été jugé utile de faire surveiller par des spécialistes restant au sol, certains paramètres. C’est pourquoi Concorde est équipé d’un dispositif de télémesure qui transmet vers le sol, d’une part un message codé, d’autre part quatre signaux modulés en fréquence représentant des mesures de vibration des réacteurs.
La réalisation de cette installation présente de grandes difficultés dues aux conditions mêmes des vols et en particulier aux grandes variations de températures.
Chaque système a nécessité souvent l’emploi de matériels nouveaux, tant pour les mesures que pour les enregistrements. Enfin, l’installation d’essais comporte sa propre génération électrique continue, qui la met à l’abri des fluctuations inévitables des tensions d’alimentation.
Les diverses mesures de pression de température, de contraintes, de déplacement et d’accélération sont ainsi assurées avec toute la précision exigée, souvent supérieure à 1%.

Le poids total de l’installation d’essais de bord approche de 12 tonnes, dont 6 tonnes environ pour les équipements de cabine, répartis en 39 armoires d’un volume total de 13 m3.

Salle de télémesures des essais en vol de Toulouse

Cette télésurveillance est très importante pour assurer la sécurité de l’avion en vol. Il y a donc d’une part les échanges classiques en téléphonie sans fil entre l’avion et le sol, dans les deux sens, auxquels s’ajoute, comme on l’a vu, la transmission au sol par la télémesure d’un certain nombre de paramètres
Pour les exploiter on a créé à Toulouse et à Filton des stations de télémesure qui sont capables de décoder les messages reçus par cette voie et de les présenter à des observateurs spécialistes sous forme d’indications instantanées et continues.

Parallèlement, la surveillance est assurée également par les tours et les centres de contrôles classiques. En particulier, le Centre d’Essais en Vol suivra Concorde et il est de plus chargé de mesurer le bang supersonique grâce à une chaîne de microphones ayant déjà été utilisée par les Mirage IV.
Mais la zone de travail de l’avion en vol est beaucoup plus étendue que dans le cas des avions subsoniques, avec des bases de vol en ligne droite atteignant 1000 kilomètres. C’est le cas des essais en régime supersonique prolongé, croisière à plus de Mach 2, qui se dérouleront sur un axe situé au-dessus de l’Océan Atlantique entre Dakar et un point situé au voisinage de l’île de Man.
Dans ces conditions les liaisons radiophoniques, entre l’avion et sa base, et la transmission des mesures de télésurveillance sont assurées par un système de stations relais. Un réseau téléphonique de haute qualité ramène alors les messages au poste central de la base.

Exploitation des informations

Les centres de dépouillement au sol sont conçus de façon à permettre d’une part, une exploitation primaire rapide des observations effectuées en vol et à fournir d’autre part aux calculateurs scientifiques les éléments de diverses études plus complexes, susceptibles le cas échéant de tenir compte des résultats d’un certain nombre de vols.
Une heure après le vol, les dépouillements primaires sont présentés, sous forme de tableaux imprimés de courbes d’évolution en fonction du temps, pour vérifier les conditions générales du vol, détecter les anomalies éventuelles du comportement de l’avion ou du fonctionnement des systèmes et de l’installation d’essais et exploiter certains résultats du vol.

Vue partielle du laboratoire de dépouillements des mesures numériques effectués en vol

Ainsi chaque centre comporte quatre traceurs à 25 voies capables de tracer en 18 minutes, 100 courbes reproduisant l’évolution de 100 paramètres au cours d’un vol de trois heures.
L’utilisation à Toulouse et à Filton d’installations d’étalonnages et de matériels de dépouillement identiques assure l’homogénéité des résultats obtenus de part et d’autre.
Chacun de ces centres est en effet constitué autour de calculateurs universels puissants dont les programmes sont interchangeables Par des unités de liaisons appropriées ces calculateurs lisent les données numériques enregistrées à bord (enregistreurs principal et d’accident), en exploitent une partie, et restituent sur bande magnétique standard la totalité des résultats acquis pour exploitation ultérieure sur n’importe quel calculateur scientifique.

Auxiliaire de programme

C’est pour assurer dans tous les domaines une préparation aussi poussée que possible des essais en vol de Concorde que divers moyens auxiliaires ont été et seront utilisés pour étudier le comportement en vol, familiariser les équipages avec les réactions de l’appareil et tester les méthodes d’essais envisagées. Parmi les moyens aériens utilisés, il faut citer : le HP 115, le BAC 221, le Mirage III B équipé en simulateur volant et le Mirage IV.
Sur le Mirage III B à stabilité variable, le système des commandes de vol a été transformé par interposition de boites électroniques qui permettent de modifier à volonté les coefficients aérodynamiques et les lois d’efforts du Mirage de telle façon que pour un cas de vol déterminé tout se passe pour le pilote comme s’il volait à bord de Concorde.
Un Mirage IV a été par ailleurs utilisé à la mise au point des méthodes de mesures de performances et quelques un de ces vols ont été consacrés à l’examen de certains problèmes d’intégration de Concorde au trafic réel dans la région parisienne.

Enfin, les travaux approfondis qui se poursuivent au sol sur les simulateurs de Concorde à Toulouse et à Filton sont destinés à parfaire dans toute la limite du possible les expérimentations et les mises au point indispensables avant les vols. En plus de leur participation aux études et à la mise au point de l’avion, ainsi qu’à la familiarisation des équipages avec les réactions de l’appareil, les simulateurs de vol auront un rôle important pendant le déroulement des essais. Appelés à intervenir pour la préparation des vols, ils seront également utilisés pour en contrôler ou en interpréter les résultats et les exploiter en vue des vols futurs, afin d’alléger au maximum le programme des vols.