Air & Cosmos : BOOM fera voler son démonstrateur technologique début 2020

Article d’Antony ANGRAND

L’avionneur de Denver a annoncé au Salon du Bourget que le XB-1, démonstrateur technologique de son futur JET de transport supersonique civil, ferait sa sortie d’usine en décembre 2019. Celle-ci sera suivie d’un premier vol au début de l’année 2020.

« La sortie d’usine du démonstrateur technologique XB-1 se fera à la fin décembre 2019 et le premier vol interviendra au début de l’année 2020”, commente Blake Scholl, président-fondateur de Boom, lors de la conférence de presse qui s’est tenue dans le cadre du Salon du Bourget. Et d’ajouter : « Depuis deux ans, nous avons effectué beaucoup de progrès, non seulement en ce qui concerne le développement de nos appareils, mais également au niveau de notre société”. Boom a effectivement réalisé des avancées notables. Les plus visibles sont d’abord des évolutions d’image, soit un changement de logo et la suppression du mot ”supersonic » qui était jusqu’alors accolé à la marque.

L’Overture, futur avion de transport supersonique civil de Boom, n’a pas encore fait l’objet d’un choix précis de turboréacteur.
Sur le plan industriel, le XB-1 est en voie d’assemblage. Ce démonstrateur technologique à échelle 1/3 doit attester que l’emploi de matériaux composites à grande échelle (fuselage et voilure), que les systèmes de propulsion compatibles avec le vol supersonique. Le XB-1 permettra également de vérifier le bien-fondé de sa configuration aérodynamique et servira aussi à vérifier les systèmes de commandes et la configuration structurelle générale. Comme feu le Concorde, en supersonique, le XB-1 utilisera du kérosène emporté pour modifier son centrage. L’appareil emportera 3,1 tonnes de carburant, qu’il stockera dans un total de onze réservoirs.

Les essais et le retour d’expérience permettront alors à Boom de lancer par la suite l’étude, puis la construction, d’Overture, soit le futur avion de transport supersonique civil de Boom.

Ces douze derniers mois, le constructeur aéronautique de Denver, dans le Colorado, n’a pas chômé puisqu’il a validé l’aérodynamique de son appareil, avant de se lancer dans la conception détaillée de ce dernier, qui totalise pas moins de 838 plans pour l’ensemble de l’appareil. Lequel, de son côté, comportera au final plus de 4000 pièces. L’entrée d’air à géométrie variable retenue pour le XB-1, qui doit démontrer que le futur supersonique de Boom sera capable de voler à Mach 2,2, a fait l’objet d’études et d’essais en soufflerie, l’ensemble (conception et essais de cette entrée d’air spécifique) ayant été réalisé en neuf mois. La maquette de soufflerie du XB-1 a été soumise aux essais de vrille dans une soufflerie verticale. Le XB-1 a largement bénéficié de l’apport de la CFD, mais également d’essais au National Institute for Aviation Research, à l’Université d’Etat de Wichita. Si le comportement de l’appareil à l’approche des vitesses supersoniques semble avoir été analysé et prédit par le biais de la simulation numérique, l’avionneur se retrouve confronté au problème des basses vitesses, notamment au moment de l’atterrissage et du décollage. C’est ce qui explique, entre autres, la présence d’un dispositif spécifique, dit Stability Augmentation System, qui vise à améliorer le comportement et le contrôle de l’avion. Plus de 1300 simulations d’écoulement en différentes conditions de vol ont été réalisées.

Moules

L’outillage destiné à réaliser le fuselage avant (de la pointe jusqu’au cockpit) ainsi que les panneaux de voilure, c’est-à-dire les moules, puisque les pièces seront réalisées en matériaux composites, et les sous-ensembles du train avant sont prêts. Le collage des sous-ensembles cockpit a été effectué, tandis que les longerons de voilure vont passer de la phase fabrication à celle d’usinage-façonnage, avec perçages et mise en forme définitive.

Le XB-1 sera propulsé par trois General Electric J85-15, un turboréacteur simple corps connu pour avoir notamment – entre autres – motorisé le Northrop F-5 Tiger. A l’origine, Boom comptait utiliser la version civile du J85, soit le General Electric CJ610, qui motorise nombre de Learjet. Mais ce sera finalement la version militaire qui propulsera « Baby Boom”, surnom donné au XB-1. Compact et léger, ce turboréacteur a également pour avantage d’avoir été produit en grand nombre, à plus de 15.000 exemplaires. Il offre un surcroît de poussée à hauteur de 20% sur la version J85-21, employée précédemment sur le F-5 Tiger II, laquelle dispose d’un étage compresseur supplémentaire par rapport au CJ160, mais également d’une postcombustion qui ne sera pas utilisée sur le démonstrateur.


Le démonstrateur technologique XB-1 réalisera sa sortie d’usine en décembre de cette année et devrait voler début 2020.
Ces moteurs, qui ne seront d’ailleurs forcément les moteurs retenus pour l’Overture, puisque Blake Scholl a confié que Boom continuait à évaluer différentes motorisations et qu’actuellement aucune n’avait été encore retenue, ont été modifiés par Boom. Au moins l’un d’entre eux a fait l’objet d’essais réalisés sur un banc statique avec l’aide de l’US Air Force. Ce turboréacteur a non seulement été testé, mais il a aussi fonctionné avec un carburant alternatif, destiné à minimiser l’empreinte carbone laissée par l’appareil. Boom a notamment mis en avant sa collaboration avec la société Prometheus, qui lui fournira un carburant spécifique pour les essais du XB-1, lequel devrait, selon Boom, ne dégager aucune émission de CO2.

Pilotes d’essai

Boom a également annoncé qu’un nouveau pilote d’essai, en l’occurrence Chris ”Duff » Guarente, diplômé de l’école des pilotes d’essai de l’US Air Force, rejoignait le programmeXB-1. L’intéressé a par ailleurs récemment volé aux commandes du Stratolaunch, dans le cadre du baptême de l’air du géant, et rejoint maintenant Bill « Doc” Shoemaker, qui a largement contribué au développement du XB-1 depuis qu’il a intégré Boom en 2018. Bill Shoemaker a fait bénéficier le constructeur de son expertise, notamment dans le cadre de l’aménagement du cockpit de l’appareil, de la conception des systèmes et surtout de celui des commandes de vol, ainsi que du simulateur de vol du XB-1 que l’avionneur a conçu.

Concernant l’Overture, Boom a avancé quelques maigres. Ainsi que précisé précédemment, il n’a pas encore arrêté son choix concernant la motorisation définitive du triréacteur supersonique. Si l’avionneur de Denver a réalisé des progrès notables dans le cadre de son programme de démonstrateur, il reste toutefois confronté pour le moment au même problème de base qu’ont connu tous les avionneurs ayant souhaité concevoir un jet civil supersonique, qui conditionne la poursuite et la réalisation d’un tel appareil. Il s’agit en effet de trouver un turboréacteur qui ne soit pas trop gourmand en carburant et qui autorise le vol à vitesse supersonique, qui ne nécessite pas de séquences de maintenance trop rapprochées – cat les coûts doivent être contenus puisque Boom précise qu’à la différence de ”Concorde », l’Overture sera rentable, et pas seulement sur la route aérienne, Paris-New York. Problème qui se complique du fait que Boom annonce l’emploi de double-flux pour l’Overture, qui doit voler à la vitesse de Mach 2,2. Ce qui n’empêche pas malgré tout de susciter l’intérêt de Japan Airlines, dont l’un des représentants, Takeshi Morita, est venu réaffirmer le soutien de la compagnie aérienne à Boom. JAL a précédemment placé une commande optionnelle de vingt Overture après avoir investi 10 M$ dans la société de Blake Scholl. Rendez-vous donc en décembre 2019, pour la sortie d’usine du XB-1.