Devant plus de cent journalistes spécialisés (anglais et français) s’est déroulée récemment à Toulouse une spectaculaire démonstration prouvant que Concorde est devenu une réalité. C’est en effet le 4 mars dernier qu’un convoi exceptionnel particulièrement important a traversé la ville de Toulouse. Des ateliers de Sud Aviation Blagnac où il a été assemblé, un tronçon central du fuselage et des ailes de Concorde à été transféré à l’Ecole Vétérinaire, d’où il est reparti le lendemain pour être mis en place dans les nouvelles installations d’essais de l’Etablissement Aéronautique de Toulouse à Pont de l’Hers.

Cet ensemble, qui porte la désignation 2,8 b, dont la longueur atteint 10,70 m, avec une envergure de 13,50 m, et une hauteur de 3,40 m, représente un poids total de 16 tonnes.

On peut souligner ici en effet, que bien qu’il soit désigné sous le nom d’éprouvette, cet ensemble d’essai est un ensemble réel de l’avion, construit à l’échelle grandeur. Les essais statiques auxquels il est soumis à l’EAT, constituent un des chapitres les plus importants d’un programme complet au cours duquel tous les ensembles constitutifs de l’avion sont également éprouvés.

La réalisation de ce tronçon-type d’un avion supersonique, le plus grand qui ait jamais été construit, résume la plupart des connaissances et de l’expérience acquises depuis 10 ans en France et en Grande-Bretagne dans la technique du supersonique. Pendant cette période les deux pays ont travaillé, séparément d’abord, puis en collaboration à partir de 1961, sur les problèmes que posent la conception et la construction d’un avion de transport supersonique, enrichissant ainsi leurs industries respectives d’une somme considérable de connaissances technologiques nouvelles.

L’avion de transport supersonique Concorde, destiné à naviguer à Mach 2,2, c’est-à-dire à la vitesse de 2335 km/h, est appelé à rencontrer en vol des conditions très sévères. C’est pourquoi il a été nécessaire d’établir un programme d’essais extrêmement complet.

Au cours de ces essais destinés à éprouver la bonne tenue des structures dans des conditions aussi proche que possible de celles du vol, il a été nécessaire de simuler les effets thermiques s’ajoutant à l’action des charges aérodynamiques, des charges d’inertie et de la pressurisation. Les installations d’essais comportent donc des dispositifs de chauffage et de refroidissement programmés qui augmentent encore leur complexité.

Deux cellules complètes seront construites pour les essais structuraux destinés à l’obtention du certificat de navigabilité. La première sera soumise à un programme complet d’essais statiques, dont le but est de vérifier les marges de résistance de la structure sous l’action des charges qu’elle est appelée à supporter dans les cas de vol les plus sévères, à la limite de son domaine d’emploi. Ces essais auront lieu en France à l’EAT de Toulouse. La seconde cellule est réservée aux essais de fatigue destinés à confirmer la durée de vie de l’avion en service. Ces essais auront lieu en Grande-Bretagne au RAE de Farnborough.

Avant ces essais d’ensemble, il est nécessaire de procéder à des essais partiels. Ceux-ci comprennent des essais préliminaires déjà exécutés sur un certain nombre de tronçons pour justifier les principes de construction adoptés. Ils comprennent également ceux auxquels seront soumis, au fur et à mesure de leur réalisation, tous les grands ensembles constitutifs de l’appareil.

L’avantage de cette méthode est d’abord de fournir plus rapidement l’expérience et les vérifications nécessaires. Elle permet également d’organiser les essais d’une façon rationnelle, chaque ensemble étant soumis aux chargements correspondant aux cas de vol qui lui sont spécifiquement les plus défavorables.

C’est dans le cadre de ce programme que le tronçon central de fuselage est soumis à Pont de l’Hers à une série d’essais statiques effectués à froid et à chaud.

En prévision de ces essais, l’éprouvette a été équipée d’une quantité impressionnante de jauges extensométriques – 2000 jauges – et de thermocouples – 1000 thermocouples dont les connexions aux appareillages de mesure ne nécessitent pas moins de 100 kilomètres de fils.

A son arrivée à l’Hers, elle a reçu encore 700 jauges et 600 thermocouples, soit 45 km de fils de connexion, qui en raison de leur disposition extérieure risquaient d’être endommagés au cours du transport.

Les essais de ce tronçon et de ceux qui le suivront bientôt, sont effectués sous le contrôle des Services Officiels Français par les soins de l’Etablissement Aéronautique de Toulouse (EAT). Un bâtiment a été spécialement construit à Pont de l’Hers pour les abriter.

Ses dimensions sont imposantes : 65 mètres de longueur utile, 50 mètres de largeur, 25 mètres sous ferme.

Il est équipé de 2 ponts roulants possédant chacun 2 crochets de 10 tonnes. Deux portes, disposées sur 2 côtés perpendiculaires, mesurent 30 mètres de large et 18 mètres de haut.

Des rails d’arrimage de 1,50 mètre sont scellés dans le sol et un mur d’essais statiques (14 x 10 x 2,5 mètre) de 100 tonnes est également prévu.

Deux réseaux d’air comprimé fournissent  des pressions de 7 et 30 kg. L’installation électrique est alimentée à l’origine en 72.000 volts et des cuves permettent d’effectuer des essais de refroidissement à l’azote liquide.

Les installations de mesures, capables d’enregistrer 2000 mesures en 10 secondes, comprennent en particulier un ordinateur PALLAS construit par la Compagnie des Compteurs, jouant le rôle de moniteur d’essais et assurant le dépouillement.