Alors que le programme Concorde entre dans sa phase décisive, les possibilités de l’appareil donnent lieu à des controverses de plus en plus vives. En définitive, son premier vol, qui fait l’objet de préparatifs prudents, fournira des réponses à quelques-unes des innombrables questions que l’on se pose. Ce projet met en jeu des capitaux si importants et le prestige de deux nations si étroitement alliées que se hâter lentement est devenu un mot d’ordre. La question la plus importante est peut-être la vitesse choisie pour Concorde. A cette question sont étroitement liés les problèmes de la forme à donner, des matériaux à utiliser pour obtenir les performances recherchées avec le minimum de frais d’exploitation. Sur bien des points, il y a peu de différences fondamentales entre le Concorde et les autres avions civils. En fait, la question capitale est de savoir si cet appareil représente une nette amélioration sur le plan de la vitesse, de la construction et de la rentabilité. Bien que le rapport charge marchande/distance franchissable ait fait l’objet de vives et nombreuses curiosités, les constructeurs, dans l’attente des essais en vol, n’ont jusqu’à présent donné que des réponses d’ordre général. Ces essais permettront également de connaître la traînée totale du Concorde, question dont nul ne connaît encore la réponse exacte. Cependant, la plupart des experts sont optimistes à ce sujet et les critiques seront peut-être agréablement surpris car les constructeurs se sont montrés extrêmement prudent sur ce point.
Par ailleurs, il est normal que les contribuables manifestent une certaine inquiétude devant l’importance des sommes consacrées à ce programme. Les compagnies intéressées sont avides d’informations pour la planification future de leur flotte, cependant que les constructeurs de Concorde préfèrent ne pas s’engager sur des questions aussi importantes ; cette situation n’est pas sans créer une certaine impatience. Il ne faut pas oublier que pour un vol transatlantique, par exemple, un accroissement de 1% de la traînée exige une tonne supplémentaire de carburant. La distance franchissable est évidemment d’une importance capitale ; le rapport distance/charge marchande pour le franchissement de l’Atlantique dans le sens est-ouest aura une influence considérable sur les ventes.
La période entre la sortie d’usine et le premier vol est pour nous l’occasion de faire le point sur ce programme. L’ambitieux projet qui justifie l’appellation Concorde a permis aux ingénieurs de la British Aircraft Corporation et de Sud Aviation ainsi qu’aux nombreux sous-traitants qui ont fourni les équipements d’unir leurs efforts dans un esprit de confiance mutuelle. Il suffit de rappeler brièvement les étapes successives de sa construction. A l’origine de ce projet figure l’accord franco-britannique du 29 novembre 1962 répartissant également les travaux entre la France et la Grande-Bretagne. Le programme initial était l’oeuvre de Bristol Aircraft Ltd. (absorbée depuis lors par la BAC) et de Sud Aviation. Des contacts poussés entre les deux entreprises révélèrent par la suite que chacune envisageait un projet identique : un avion de transport volant à Mach 2,2. Le principe de l’aile en delta à flèche évolutive fut retenu de préférence à la géométrie variable, en raison de sa relative simplicité structurale et parce que sa faible traînée d’onde assure un excellent rendement aérodynamique en vol de croisière. Le contour en ogive de l’aile est le résultat de recherches par l’Aerodynamics Department du Royal Aircraft Etablishment de Bedford, en vue de réduire au maximum la traînée d’onde par un faible allongement et une flèche importante, tout en réduisant la traînée induite et la traînée de profil en combinant au mieux l’envergure et la surface alaire. Parmi ses nombreuses caractéristiques inhabituelles, l’aile en delta à flèche évolutive crée sur le bord d’attaque une série de tourbillons qui se renforcent au fur et à mesure que l’incidence s’accroît, de sorte qu’aucun décrochage au sens usuel du terme ne se produit. Ces tourbillons ont pour effet d’augmenter le coefficient de portance même lorsque l’angle d’attaque est anormalement grand.
Lors de la signature de l’accord en 1962, les premières études et le programme de développement des deux prototypes – l’un français, l’autre britannique – furent estimés à 150 millions de livres. Moins de deux ans plus tard, il apparut nécessaires d’agrandir les dimensions de Concorde et de le doter de moteurs plus puissants afin qu’il présente, pour les compagnies américaines et européennes, suffisamment d’intérêt pour la traversée de l’Atlantique nord. C’est le turboréacteur Bristol Siddeley Olympus, déjà en construction depuis plusieurs années et susceptible d’être considérablement amélioré, qui fut retenu. Le modèle 593 qui fut monté sur le Concorde avait été commandé à l’origine pour le BAC TSR 2 et mis au point conjointement par BSE (devenue depuis Bristol Engine Division de Rolls-Royce) et la SNECMA, la société française qui produit l’ensemble d’éjection. Lors de sa mise en service en 1971, l’Olympus stade 0 fournira 14.900 kilos de poussée. Avant 1973, cette poussée passera à 15.900 kilos, ce qui permettra à l’appareil de transporter de Paris à New York la charge marchande garantie de 11,3 tonnes. Aux essais au banc, le moteur a déjà dépassé ses performances garanties.
Au cours des deux années qui ont suivi l’accord de 1962, l’estimation des coûts de développement de Concorde est passée de 150 millions de livres à 280 millions et en 1966 elle était de 370 millions, soit plus du double du montant initial, par suite de l’accroissement général des coûts ainsi que la décision de construire deux prototypes supplémentaires. Le fuselage de ces prototypes était 2,13 mètres plus long que les autres, c’est-à-dire identique à celui des appareils de série. Quelques mois plus tard le coût définitif total des quatre prototypes, des deux cellules pour essais structuraux et des essais en vol jusqu’à l’homologation fut estimé à 500 millions de livres (1966), compte tenu d’une certaine marge de sécurité. Ce chiffre n’a pas varié depuis.
1 – Comparaison entre prototypes et version de série de Concorde
De même que les dimensions, le poids maximal a été augmenté et les calculs portent maintenant sur un poids total de 166,5 tonnes qui sera peut-être porté à 170,5 tonnes entre le premier vol et l’homologation de l’appareil, si tout se déroule normalement, et sa mise en service, prévue pour 1971. L’un des principaux paramètres de la construction a été la limitation des températures du revêtement, afin de pouvoir utiliser pour l’ensemble de la structure des matériaux et des techniques de fabrication classiques. La durée de vie a été fixée à 45.000 heures de vol, chiffre élevé si l’appareil doit être amorti en dix ans. Afin que l’augmentation du poids maximal autorisé ne compromette pas la durés de vie structurale, la température maximale a été réduite de 426° K à 400° K ce qui a eu pour effet d’entraîner une diminution de la vitesse de croisière en conditions ISA, de Mach 2,2 à 2,01. Il n’en résulte qu’une faible prolongation, de l’ordre de 5 minutes, de la durée du vol estimée à 3h20mn sur le trajet Londres-New York. Il est intéressant de noter que sur plus de 35% des longues routes aériennes du monde, la température ambiante sera assez réduite pour permettre une vitesse de croisière de Mach 2,2.
Ci-dessus, plan trois-vues de la version de présérie du Concorde. On voit la nouvelle porte-passager ménagée, au-dessus de la partie avant de la voilure. Le fuselage est allongé de 2,13 mètres.
Comme on l’a vu précédemment, les performances exactes sont pour l’instant tenues secrètes et une spécification détaillée ne sera pas publiée avant plusieurs mois.
Le Concorde représente une amélioration considérable sur le plan de l’aérodynamisme, de l’ingéniosité de construction et du rendement propulsif. La question est de savoir si cette amélioration s’inscrit logiquement dans l’évolution de la technique. La structure de Concorde est essentiellement en alliage léger, à base de matériaux de qualité avérée et les techniques d’assemblages sont relativement simples. Certes son échauffement sera considérable, nettement supérieur à la température d’ébullition de l’eau, mais cette structure constitue une étape logique de l’évolution de la technique, même si l’amélioration de la vitesse de croisière est de l’ordre de 270%. Les moteurs dérivent d’un modèle qui existait il y a une quinzaine d’années déjà et leur puissance a été triplée entre temps.
2 – Caractéristiques techniques
3 – Aménagements types avec toilettes centrales.
A et B – version touriste avec 136 fauteuils au pas de 86,4 cm ; C – version mixte (deux classes) avec 12 fauteuils au pas de 101,6 cm et 112 fauteuils au pas de 86,4 cm ; 1 – issues et équipements de secours ; 2 – ensembles électroniques et électriques ; 3 – toilettes ; 4 – bagages ; 5 – vestiaires ; 6 – offices.
Il reste à Concorde à faire la preuve de ses possibilités sur le plan de la rentabilité, à savoir le rapport charge marchande/distance franchissable. A l’origine, cet appareil était conçu pour transporter 118 passagers pour un poids maximal d’environ 120.000 kilos. Lorsqu’il apparut que ses dimensions et son poids devraient être considérablement accrus pour la traversés de l’Atlantique-Nord, sa longueur hors-tout fut augmentée de 2,13 mètres, la longueur de la cabine de 5,80 mètres et le nombre de sièges porté à 140. Par la suite, il fallut, pour agrandir les installations de bord, réduire le nombre de sièges : 136 en classe touriste ou 124 en classe mixte (12 en première classe et 112 en classe touriste)
Section de la cabine (aménagement touriste).
Ci-dessous : à gauche, l’office avant et la cabine aménagée en version touriste de la maquette du Concorde.
A droite, les quatre dernières des quinze rangées de fauteuils qui équipent la partie avant de la cabine dans la version touriste.
Concorde sera évidemment un appareil de prestige pendant trois ans au moins avant l’entrée en service de son concurrent américain. Des sommes considérables seront donc consacrées à l’aménagement de la cabine, malgré son diamètre relativement faible.
Il est à noter qu’au stade actuel de leur développement, le Concorde et le TSS américain ne sont pas directement en concurrence. Le poids du TSS américain sera le double de celui de Concorde (300 tonnes), son fuselage de 97 mètres de long, son aile à géométrie variable et sa cellule en grande partie en titane. Il représente une amélioration considérable sur le plan technique, mais ne sera pas disponible avant 1975 environ.
Malgré sa construction relativement simple, le Concorde est de loin l’avion le plus cher qui ait jamais été construit. Les crédits officiellement affectés à sa construction, à part égale, par la Grande-Bretagne et la France représentent 500 millions de livres (sans compter les coûts de recherche et de développement dans chacun de ces pays). Ce montant sert à la construction des deux prototypes, des deux appareils de présérie et des deux cellules d’essais ainsi qu’au financement des essais nécessaires à l’obtention du certificat de navigabilité, soit un coût unitaire d’environ 80 millions de livres. Le prix actuel de 166 tonnes d’or (le poids de Concorde) est légèrement inférieur à 80 millions de livres.
Un autre chiffre particulièrement intéressant à noter est le coût horaire calculé sur toute la durée de vie prévue pour Concorde. Le coût unitaire proposé est actuellement d’environ 7,7 millions de livres ou 9,4 avec un supplément de 20% pour les rechanges. En vol ou non, le Concorde se déprécie d’environ 100 livres par heure. Malgré son excellente rentabilité, son taux d’utilisation devrait être très élevé (4000 à 4500 heures par an).
En collaboration avec les compagnies aériennes qui ont déjà commandé Concorde, la BAC et Sud Aviation ont effectué une intéressante série d’analyses opérationnelles. Les résultats des études effectuées pour le compte de chaque compagnie sont confidentiels, mais une analyse portant sur une flotte de huit avions desservant un réseau hypothétique a été publiée. A l’aide de calculateurs, on a pu déterminer pour une période d’un an toutes les dépenses d’exploitation, le taux d’utilisation des appareils, les conditions météorologiques probables, les mouvements de nuit sur les aéroports et de nombreux autres facteurs pour un réseau reliant l’Europe, les Etats-Unis, le Japon et l’Australie.
Cette étude avait pour but de déterminer dans quelle mesure l’importance de la flotte serait affectée par les limitations de la vitesse de croisière pendant le survol des terres. On a découvert que le fait d’intercaler des paliers subsoniques sur certains tronçons de routes n’a aucun effet sur l’importance de la flotte. Les départements d’études et des ventes de la BAC et de Sud Aviation affirment qu’en limitant le vol de croisière à Mach 0,9 pour éviter le bang sonique la distance franchissable n’est que de 2% inférieure à celle que l’on obtient à Mach 2,2.
Si l’on considère que la durée du voyage pour l’étape type Paris-New York est d’environ 3h20, les problèmes de personnel et d’équipements au sol sont, pour la compagnie exploitante, identiques à ceux que l’on rencontre actuellement sur des étapes moyennes. On peut faire la comparaison avec un Boeing 707 qui fait de nos jours la liaison Londres-Athènes. Le monde n’aura jamais paru si petit ; en décollant de Londres, par exemple, à 10h00, on arrivera à New York à 8h30. Deux allers et retour par jour sur cette route seront alors possibles.
Et maintenant que sera l’avenir ? Le prototype 001 de Concorde est sorti des usines Sud Aviation de Toulouse le 11 décembre 1967. La date de son premier vol avait été initialement fixée au 28 février 1968 mais, au moment où nous écrivions ces lignes (janvier), un certain retard semblait inévitable. Le premier vol, qui doit durer 45 minutes, prévoit une montée à 4500 mètres d’altitude, train sorti et nez en position basse. A cette occasion, l’appareil ne dépassera pas la vitesse de 250 noeuds.
Le prototype 002, assemblé à Filton, est presque terminé ; son premier vol est prévu pour le mois de septembre. Les appareils de présérie 01 et 02 voleront respectivement le 31 décembre 1969 et le 28 février 1970. Les premiers vols des avions de série N° 1, 2 et 3 ont été fixés dans l’ordre aux 30 juin, 31 août et 30 novembre 1970. Ces appareils participeront au programme d’essais qui nécessitera 4375 heures de vol. En juin 1971, 4165 heures de vol auront été réalisées ainsi que 150 heures pour les essais d’atterrissage automatique et 60 heures pour les essais sur terrains chauds et en altitude.
Les deux prototypes sont presque identiques et sont interchangeables dans le programme à l’exception de certains équipements d’essais. L’équipage français sera dirigé par André Turcat (qui pilotera le prototype 001 lors de son premier vol) et l’équipage britannique par Brian Trubshaw.
Les Concorde de présérie et de série seront affectés suivant les besoins au programme d’essais en vol et au programme d’essai des équipements. Les essais en croisière supersonique prolongée s’effectueront entre un point situé en Mer d’Irlande et Dakar. Les mesures de bang sonique auront lieu à Istres où existe une chaîne de microphones déjà utilisées avec le Mirage IV.
Le pilote de Concorde sera assis bien en avant de l’atterrisseur avant. Il pourra voir le sol à une douzaine de mètres en avant de l’avion lorsque le nez sera abaissé et pour certaines manoeuvres – notamment les virages de 180° – il passera au-dessus de l’herbe. Cependant, rien n’est laissé au hasard. Une installation de télévision en circuit fermé sera utilisée sur le prototype pour étudier la technique du roulement au sol. Les avions de série seront équipés, si nécessaire, de caméras de télévision pointées vers l’avant et vers l’arrière. L’écran placé dans le poste de pilotage permettra de contrôler les évolutions au sol. De plus, le système permettra à l’équipage de surveiller le train d’atterrissage, le dessous de l’avion et les entrées d’air des réacteurs.
Concorde est conçu pour le vol de croisière jusqu’à Mach 2,2 et jusqu’à des altitudes de 20.000 mètres ; les turbulences en croisière ne se rencontreront qu’aux altitudes plus faibles. Néanmoins, des essais de stabilité et de contrôle sont en cours pour confirmer que les turbulences à moyenne et basse altitudes ne présenteront aucun problème. Pour les passagers, Concorde sera vraisemblablement plus confortable aux vitesses de croisière que le Douglas DC-8 ou le Vickers VC-10.
Les radiations cosmiques, ainsi que celles qui pourraient provenir des débris d’explosions nucléaires, ne sont pas dangereuses pour Concorde. Par contre, les radiations qui proviennent des éruptions solaires seraient plus dangereuses, mais elles sont très rares. Le niveau de radiation sera contrôlé de façon continue et toute dose dangereuse sera signalée à l’équipage sous forme d’alarme lumineuse. Il suffira alors de réduire l’altitude à 15 000 mètres pour poursuivre le vol en toute sécurité.
Au moment où nous écrivons ces lignes, 72 Concorde ont été commandés par 15 compagnies aériennes. La compagnie Quantas a pris 4 options qui seront transformées en commandes fermes vers la fin 1968 lorsque les performances de l’appareil seront suffisamment connues. Le programme de production est en préparation et les matières premières ont été commandées.
4 – Poste de pilotage.
Le poste de pilotage est conçu pour un équipage de trois personnes : deux pilotes et un mécanicien navigant. Tous les sièges sont montés sur rail. Les deux sièges des pilotes sont réglables en position longitudinale et en hauteur et sont pourvus de dossiers inclinables, d’accoudoirs repliables et de harnais de sécurité à enrouleur à inertie. Le siège du troisième membre d’équipage, équipé de façon similaire, peut pivoter. Un quatrième siège est prévu à l’arrière du siège pilote. De plus, un strapontin peut être installé derrière le siège du mécanicien, au niveau de l’allée centrale
12 – consoles latérales 13 – instruments pilotes 14 – vitres principales
Les instruments pilotes sont présentés sur trois panneaux. Sur la planche centrale, le routier automatique, le radar météorologique et son dispositif de commande occupe presque toute la place. La disposition des instruments sur chacune des deux planches pilotes suit la pratique habituelle. On n’utilise des instruments à échelle rectiligne que lorsque cette forme de présentation paraît plus logique. Tous les autres instruments sont de présentation traditionnelle.
Le pylône central porte le secteur des manettes de commande des gaz, sur lesquelles sont montés les leviers des inverseurs de poussée. Les commandes du système hydraulique sont placées à gauche des manettes de gaz. A droite se trouve la commande du frein de parc, ainsi que celle de la visière et du nez basculant. De chaque côté du pylône central se trouvent les volants du trim de profondeur. Les volets des trims de gauchissement et de direction sont groupés en arrière des manettes de gaz, avec les boutons de commande de la réchauffe. Sur le panneau arrière du pylône sont placés les boites de commande des deux calculateurs de navigation, les deux boites de commande VHS, les interrupteurs des robinets hautes pressions et la commande de secours du train d’atterrissage.
Le panneau de plafond comporte plusieurs planches échelonnées. Sur la planche avant se trouvent les alarmes générales, les commandes de désembuage, les boutons de commandes des feux extérieurs et des consignes passagers et les commandes d’essuie-glace et du liquide anti pluie. Sur la deuxième planche sont installés les boutons de commandes manuelles de secours ainsi que les interrupteurs-inverseurs du système de commande de vol. C’est sur le troisième panneau que sont disposés les interrupteurs de la stabilisation et du trim automatiques et ceux du système de sensation musculaire. La quatrième planche rassemble les boites de commande des émetteurs-récepteurs ATC et des deux ADF. Sur la planche arrière sont montées les boites de commande des deux systèmes HF et d’un troisième système de navigation longue portée.
Le manche est surmonté d’un volant en “cornes de bélier” portant les interrupteurs d’intercommunication et du pilote automatique, ainsi que la commande du trim électrique de profondeur. Les pédales du palonnier actionnent le braquage des roues avant vers la droite et vers la gauche de 10° maximum. Le système d’orientation des roues par les pédales peut être isolé par un bouton de coupure installé sur le volant de direction, lequel commande alors l’orientation des roues de 60° maximum vers la gauche et vers la droite.
Le panneau de commande général des systèmes donne des indications concernant les systèmes suivants : turboréacteurs, combustible, hydraulique, électricité, conditionnement d’air et de pressurisation, oxygène, détection de la fumée, anti-givrage. Toute panne d’un circuit allume un voyant principal d’alarme qui se trouve à peu près au milieu du panneau. Simultanément la panne est signalée sur le panneau correspondant de ce circuit. Un second jeu de manettes de gaz est monté dans un renfoncement du panneau du groupe turboréacteurs. Ces leviers, reliés mécaniquement aux manettes de gaz du pylône central, permettent de commander les réacteurs en configuration poussée en avant. Ils sont verrouillés lorsque le pilote actionne les inverseurs de poussée.
Les panneaux de disjoncteurs sont situés à l’arrière du poste de pilotage, derrière le poste du pilote. Un panneau électro-luminescent est plaqué contre toutes les planches installées dans le poste de pilotage. Tous les instruments et affichages numériques sont à éclairage intégré.
5 – Visière et nez basculant.
Dans le but d’assurer une forme aérodynamique parfaite pendant les phases transsonique et supersonique du vol, le pare-brise est recouvert d’une visière ayant également pour fonction de le protéger contre les effets de l’échauffement cinétique. Cette visière comprend six panneaux transparents, quatre frontaux et un latéral de chaque côté. Elle repose sur deux rails dans sa partie arrière et sur une structure pivotante à l’avant et est manoeuvrée par l’intermédiaire d’un vérin hydraulique actionnant la structure pivotante avant.
De plus, toute la partie située en avant du pare-brise, y compris la visière et son mécanisme, est articulée et s’abaisse afin d’améliorer la visibilité durant le décollage et l’atterrissage. Le nez, qui peut occuper trois positions (haute, intermédiaire et basse), est aussi manoeuvré par un vérin hydraulique. Les commandes de visière et de nez sont interconnectées de manière que les positions intermédiaire ou basse du nez ne puissent être réalisées que si la commande de l’abaissement de la visière a été effectuée. De même, la visière ne peut être commandée en position haute que si le nez à lui-même été commandé en position haute, mais l’ordre n’est transmis au dispositif de montée de la visière que si le nez est verrouillé haut. Les quatre combinaisons possibles sont : visière haute, nez haut ; visière basse, nez haut ; visière basse, nez intermédiaire ; visière basse, nez bas.
La durée de manoeuvre de la visière est de six-secondes maximum ; le nez peut être abaissé en 12 secondes et relevé en moins de 19 secondes. Pendant la plus grande partie du vol, la visière est normalement en position haute. Le nez est abaissé de 5° et la visière est en position basse pendant le décollage et le début de la montée ; ils sont relevés tous les deux 4 minutes environ après le décollage. Durant l’attente, le nez et la visière restent en position haute. La visière et le nez sont en position basse en fin d’approche et pour l’atterrissage.
Dans le cas de panne hydraulique complète du circuit normal et du circuit de secours, il reste possible d’abaisser la visière pour l’atterrissage. Une commande manuelle séparée permet le déverrouillage du dispositif d’accrochage haut de la visière et, simultanément, la mise à la bâche des vérins. Etant donné que l’action des forces aérodynamiques et de gravité ne peut complètement garantir l’abaissement de la visière, un système mécanique indépendant est prévu.
Près de l’entrée de piste, avec une pente de 3°, les roues principales étant à environ 15 mètres du sol, l’abaissement du nez autorise un angle de vision sous l’horizontale de 15° et permet au pilote de voir la piste à 130 mètres en avant des roues principales.
2 – rails de guidage de la visière.
3 – glissière pour carénage de la pointe avant.
Visière en position basse
2 – vérin de carénage
3 – écrou fixe du vérin à vis
2 – verrouillage de la visière
en position haute
3 – charnière
6 – Structure.
Le domaine de vol de Concorde est caractérisé par des limitations portant non seulement sur les paramètres altitude et vitesse (ou nombre de Mach), comme pour les avions classiques, mais encore sur les paramètres centrage et température. A l’intérieur de ce domaine de vol normal, l’avion est calculé pour résister sans déformation permanente à des manoeuvres correspondant à des facteurs de charge compris entre – 1 g et + 2,5 g.
Matériaux de base.
Pour des raisons pratiques de techniques de fabrication et compte tenu de la somme d’expérience accumulée, il a été décidé d’utiliser un alliage d’aluminium comme matériau structural de base. Ce matériau est connu en France sous la désignation de, AU2GN, et en Grande-Bretagne sous celle de Hiduminium RR58. Cet alliage d’aluminium, résistant à la température et au fluage, est utilisable sous forme d’ébauches forgées, de tôles, de plaques pré-étirées et de profilés étirés. Dans les zones de la structure interne où la résistance de l’AU2GN à la chaleur et au fluage est superflue, une petite quantité d’alliages d’aluminium du type utilisé dans les avions actuels est employée. L’emploi de l’acier ou du titane est limité à quelques éléments de l’installation motrice, des gouvernes et du train d’atterrissage.
Le rapport de la résistance en traction à la densité est un paramètre caractéristique pour un matériel structural. A 125 – 130°C, et après 20.000 heures de maintien à cette température, l’alliage AU2GN a un rapport résistance/densité comparable à celui de l’acier inoxydable à 12% de chrome. Une analyse des réseaux aériens types des compagnies exploitantes montre que l’on peut s’attendre pour Concorde à des temps de vol moyens d’environ 1h½. En tenant compte de ce facteur et du fait que de nombreuses étapes seront accomplies à des vitesses inférieures à Mach 2,2, on peut estimer qu’un maintien en température d’une durée totale de 20.000 heures à 120°C correspond à une durée de vie globale atteignant 45.000 heures. En appliquant une peinture blanche sur le revêtement il sera possible d’obtenir une diminution de température de l’ordre de 6 à 11°C.
La résistance statique de l’AU2GN diminue légèrement avec la température, même au-dessous de 120°C, mais cette chute légère de résistance à chaud n’a pas obligatoirement de conséquence, car les charges de rafale et de manoeuvre les plus sévères sont rencontrées aux altitudes et vitesses faibles, alors que la température est peu élevée. On constate qu’à la fin de la durée de vie d’un vol prévue pour le matériau, celui-ci n’a subi que peu ou pas de chute de ses caractéristiques de restauration et que, même s’il est soumis à une température de 140°C pendant la totalité des 20.000 heures, il recouvrerait encore environ 95% de sa résistance statique à froid originelle.
C’est la résistance au fluage qui donne à l’AU2GN son avantage le plus marquant par rapport aux autres alliages d’aluminium. Pour des raisons pratiques, il est préférable de limiter la valeur d’allongement de fluage, pour toute la durée de vie d’un matériau, à celle obtenue lors d’une application de la charge limite (0,1% de la longueur initiale).
On a constaté que l’AU2GN reste dans la limite de 0,1% pour des contraintes égales à 16 kg/mm2, soit 40% de celle de la rupture, à la température de 120°C et au bout de 20.000 heures, alors que l’AU4G1 (L.73), un alliage d’aluminium largement utilisé actuellement, placé dans les mêmes conditions, est totalement inutilisable pour une telle durée de vie.
Ce n’est qu’aux températures situées en dehors de la plage normalement prévu pour Concorde que la contrainte de fluage à 0,1% commence à descendre aux niveaux des contraintes de fatigue. De telles températures, si elles doivent jamais être rencontrées, le seront très rarement et leur durée totale d’application étant très courte, elles n’auront qu’une influence négligeable.
Conception structurale.
La conception d’un avion long-courrier supersonique a posé aux constructeurs des problèmes nouveaux et les modes classiques de construction ont dû s’adapter à des critères encore inhabituels.
En raison de sa consommation de combustible important, un avion long-courrier supersonique est beaucoup plus affecté par une augmentation de masse à vide que les avions subsoniques actuels. Afin de gagner de la masse, il a été fait appel le plus possible à des pièces usinées. Le prix de la structure n’est pas forcément affecté par ce type de fabrication.
Bien que certaines pièces finies arrivent à peser dix à douze fois moins que leur ébauche brute, le temps gagné sur l’assemblage compense, souvent au-delà, la dépense en matière première et en usinage et, en fait, ce mode de construction peut conduire à des prix tout à fait compétitifs, grâce à l’emploi de machines-outils modernes à commande numérique à très haut rendement. On a pu évaluer à environ 20% le gain de masse d’une structure usinée par rapport aux procédés classiques.
A gauche : couple longeron n° 63. A droite : couple standard des zones centrale et arrière du fuselage (seule la partie supérieure est pressurisée).
Le vol supersonique à fait apparaître des problèmes liés aux températures. Ces problèmes ont été résolus au niveau du matériau de base par le choix de l’alliage AU2GN, mais ils nécessitent des solutions nouvelles à l’échelon des structures, en raison des dilatations différentielles des éléments. On calcule que les contraintes thermiques transitoires engendrées dans une âme de nervure ou de longeron, au cours de l’accélération ou de la décélération en vol supersonique, pourraient atteindre, sauf précautions particulières, une valeur comparable aux contraintes engendrées par les efforts normaux de vol. Pour éviter cette coûteuse pénalité, on a utilisé divers dispositifs, tels que ; structures usinées rendues déformables par une forme dite alvéolée ou grecque ; structures triangulées à membrures articulées ; structures pseudo-réticulées, c’est-à-dire usinées avec de larges alvéoles dans les parties centrales et constituant un treillis à barres encastrées.
Panneau de revêtement de voilure usiné dans la masse
Une autre conséquence, et non la moindre, de la température réside dans les phénomènes de fluage, particulièrement sensibles au niveau des assemblages. Pour atténuer cette conséquence, les principes structuraux ont eu pour objet de réduire au minimum le nombre des assemblages et cette considération a conduit à dessiner des éléments de la plus grande dimension possible. C’est ainsi que dans la partie centrale de l’aile, les panneaux de revêtement atteignent une longueur de 7 mètres.
Les précautions structurales habituelles prises pour les avions subsoniques dans les zones soumises à l’influence du bruit des réacteurs ont été généralisées pour Concorde à la quasi-totalité de la structure.
Enfin, le fait que l’aile constitue un réservoir de carburant sur plus de 60% de sa surface, fait naître des servitudes en accentuant les différences de température entre certains éléments, et il peut être déterminant dans le choix de certains échantillonnages, compte tenu de ce que les réservoirs doivent être pressurisés à haute altitude. Dans l’onglet avant, par exemple, les efforts d’inertie du carburant, ajoutés à la pressurisation des réservoirs, peuvent conduirent à des contraintes plus élevées que celles résultant des efforts aérodynamiques.
Nervures typiques de voilure
Pour présenter une vie en fatigue convenable et compte tenu du matériau choisi, la structure de Concorde est dimensionnée pour supporter en vol normal à 1 g un niveau de contraintes ayant le même ordre de grandeur que celui admis pour les avions de transport subsoniques en service.
Voilure.
Une des particularités de la voilure est que l’ensemble du revêtement est constitué de panneaux intégralement raidis, usinés à partir de plaques pré-tractionnées. Ce type de revêtement intégral présente, à poids égal, une plus grande rigidité sous les charges locales aérodynamiques ainsi que sous les surcharges dues aux actions thermiques et acoustiques. L’accessibilité aux parties internes de la voilure pour l’inspection et les réparations a constitué un souci majeur dans le dessin de la structure. La multiplicité des portes de visite facilement démontables, jointe à l’emploi généralisé de membrures internes en treillis ou évidées, permet une accessibilité totale à toutes les parties de la structure et des réservoirs. On peut diviser l’aile en cinq parties principales : 1 – la voilure centrale ; 2 – la voilure extrême ; 3 – les onglets avant démontables ; 4 – les becs d’attaque ; 5 – les élevons.
La voilure centrale, solidaire du fuselage, transmet la plus grande partie des efforts aérodynamiques, ainsi que les charges dues aux réacteurs. Elle encaisse, en outre, les réactions du train principal. Elle passe d’une structure multi-longerons à une structure en caisson à âmes multiples. Les longerons sont du type caisson avec semelles et âmes usinées et viennent de construction avec les couples correspondant du fuselage. Les nacelles des réacteurs sont fixées sous la voilure par un système d’attaches démontables. La protection de la voilure est assurée par un bouclier thermique composé de deux tôles d’acier inoxydable emprisonnant un isolant réfractaire.
La voilure extrême est un caisson à âmes multiples comme la partie à laquelle il vient se raccorder. En raison de la faible épaisseur du profil dans cette zone, les âmes du caisson et les nervures sont usinées. La jonction de cet élément avec la voilure centrale est faite au moyen de 340 boulons en acier spécial. A ce tronçon de voilure sont fixés les deux élevons extérieurs.
L’onglet assure le raccordement de la voilure au fuselage en avant du couple 41. Il est réalisé en caisson à âmes multiples, celles-ci étant du type treillis, en tubes, à l’exception de celles qui forment cloison du réservoir. Le maillage longitudinal ne comprend aucune nervure, ce qui favorise grandement l’accès interne des réservoirs. Il est réalisé par des profilés extrudés à l’extrados et à l’intrados. Une cloison oblique, ferme le caisson du côté du fuselage, en ménageant un espace d’air extérieur entre les réservoirs et le revêtement de la cabine pressurisée. L’onglet est fixé à quatre cadres du fuselage par des ferrures réglables et à la nervure 41 par une double rangée de boulons à tête fraisées.
Les becs d’attaque sont constitués par des tronçons d’une longueur de l’ordre de 1,20 mètre. Chacun de ces tronçons est encastré sur la partie fixe de l’aile par un système de fixations démontables permettant l’interchangeabilité. Les tronçons ne sont pas reliés structuralement entre eux pour atténuer les contraintes thermiques. Les tronçons situés en face des entrées d’air des réacteurs sont équipés d’un dispositif de dégivrage électrique.
Chaque demi-voilure comporte trois élevons composés chacun de deux tronçons réunis par une liaison en flexion. Chaque ensemble de deux tronçons est actionné par une servocommande.
Tronçonnement structural – répartition des fabrications
Fuselage.
D’une façon générale, le squelette du fuselage est classique avec des panneaux de revêtement supportés par des lisses extrudées, de pas serré et des cadres au pas moyen de 533 mm. Les lisses sont généralement soudées par points au revêtement et ont un profil en “Z” à l’avant du fuselage et en “T” au centre et dans la partie arrière, où la résistance à la fatigue acoustique est plus nécessaire. La section des cadres est prévue pour limiter la propagation des criques et les cadres eux-mêmes sont en deux pièces pour augmenter la sécurité (fail-safe).
Les hublots comportent un panneau intérieur supportant la pression cabine, constitué par deux lames de verre trempé chimiquement, séparées par une couche plastique intercalaire et ayant, de ce fait, un caractère fail-safe, et un panneau extérieur en verre semi-trempé, remplissant le rôle de bouclier thermique. Ce panneau, pouvant supporter la pression cabine pendant un certain temps, constitue, de ce fait, un étage fail-safe complémentaire. L’espace compris entre les deux panneaux est en communication avec l’air extérieur à travers un circuit de dessiccation. Les glaces sont planes et montées sur des panneaux usinés s’étendant le long de la plus grande partie du fuselage. La surface d’ouverture de chaque hublot dans la structure est de 1,5 dm2 afin de limiter à une valeur acceptable la décompression de la cabine en cas de rupture totale de l’ensemble des glaces d’un hublot. Les portes passagers et les portes de service sont toutes de même conception, c’est-à-dire du type à tenons s’ouvrant vers l’extérieur.
Le plancher est constitué d’un certain nombre d’ensembles supportés par une structure librement dilatable dans le sens longitudinal, ceci afin de réduire les contraintes thermiques provenant de la différence de températures entre le squelette du fuselage et les éléments longitudinaux du plancher. Chaque ensemble comprend des rails de fauteuil espacés de 527 mm. Des panneaux en balsa, revêtus de tôle en alliage léger, sont utilisés pour recouvrir le plancher.
Le fuselage peut être divisé en cinq parties :
1 – pointe avant ; 2 – partie avant ; 3 – partie intermédiaire ; 4 – partie centrale ; 5 – partie arrière. La pointe avant comprend une partie non pressurisée comportant une pointe extrême avant à géométrie variable avec visière rétractable et radome, et une partie pressurisée qui comporte les glaces du pare-brise.
La partie avant comprend la porte d’entrée des passagers, la porte de service et le logement de l’atterrisseur avant. Le plancher pressurisé couvrant le logement des roues avant se compose de membranes courbes supportées par des traverses spéciales et s’étend d’une paroi à l’autre de la partie inférieure du fuselage.
La partie intermédiaire comprend la soute à bagages inférieure où l’on accède par une porte montée sur charnières s’ouvrant à l’intérieur à la partie inférieure du fuselage.
La partie centrale comprend quatre tronçons constructifs séparés faisant partie intégrante de l’aile. La partie de ces tronçons formant cabine est pressurisée jusqu’au cadre 81. L’espace sous le plancher occupé par les réservoirs de carburant, le logement du train principal et les soutes à équipements ne sont pas pressurisés. Les zones sous-plancher situées immédiatement en avant et en arrière du logement du train principal comportent des réservoirs de carburant.
La partie supérieure de ces réservoirs est constituée de panneaux plats et de membranes qui supportent la pression de la cabine et possèdent une rigidité suffisante pour supporter vers l’avant les efforts d’inertie du carburant en cas de crash provoquant une décélération de 15 g. Sous le plancher se trouve une soute à équipements non pressurisée.
La partie arrière, qui s’étend à l’arrière de la cloison étanche, comprend le réservoir arrière de transfert de carburant. Les cadres de ce tronçon de fuselage sont renforcés par une membrure en tubes et profilés qui reprend les efforts transmis par les longerons de la dérive.
Dérive et gouvernail.
La dérive a une structure en caisson de torsion multi-cellulaire comprenant dix longerons verticaux parallèles à l’axe du gouvernail. Le revêtement est en panneaux intégraux s’étendant sur toute l’envergure de la dérive. Le gouvernail de direction est en deux parties, chacune étant attachée à la dérive par quatre articulations qui possèdent des paliers à auto-alignement par rotules garnies de téflon. Les servocommandes du gouvernail sont montés à l’extérieur, de chaque côté de la dérive.
Nacelles.
Chaque nacelle, comprenant deux moteurs, se divise structuralement en deux parties indépendantes, les entrées d’air et les compartiments moteurs prolongés par des ensembles tuyères secondaires-inverseurs de poussée.
On trouvera page suivante, un croquis de ces deux parties :
– Les entrées d’air des réacteurs.
– Le compartiment moteur.
Entrées d’air des réacteurs
1 – séparateurs de couche limite et joints, entre aile et entrée d’air ; 2 – système de commande rampe ; 3 – cloison de couche limite en panneau usiné d’alliage léger ; 4 – volets pour roulage au sol ; 5 – passages d’air vers les compartiments moteurs ; 6 – bielles d’attaches à l’aile ; 7 – cloison pare-feu en titane ; 8 – volets pare-feu en titane ; 9 – système de manoeuvre du volet de décharge ; 10 – volet de décharge en alliage léger ; 11 – rampe arrière en panneau usiné d’alliage léger ; 12 – structure principale en alliage léger ; 13 – lèvre en nid d’abeilles d’acier inoxydable ; 14 – rampe avant en panneau usiné d’alliage léger.
Compartiment moteur
A – supports moteur ; B – ferrure centrage sous l’aile centrale ; C – supports déflecteur inverseur de poussée
1 – cloison latérale ; 2 – portes d’air tertiaire (faces supérieure et inférieure) ; 3 – grilles d’inverseur de poussée (faces supérieure et inférieure) ; 4 – pétales de la tuyère secondaire ; 5 – tuyère secondaire ; 6 couple arrière de nacelle ; 7 – couple de nacelle au longeron ; 8 – portes arrière de nacelles ; 9 – portes avant de nacelles
7 – Circuits de bord.
Commandes de vol.
Plus encore sans doute que pour tout le reste de l’avion les considérations dominantes dans l’étude des commandes de vol ont été la sécurité et les qualités de vol. Du fait des caractéristiques aérodynamiques du Concorde, celui-ci ne comporte que les gouvernes principales à l’exclusion de tous volets, spoilers et aérofreins. Il y a trois élevons sur chaque aile pour la profondeur et le gauchissement et un gouvernail de direction en deux sections ; ceci limite l’effet d’une panne et permet de plus le contrôle par comparaison des positions des gouvernes. Chacune de celles-ci est attaquée par une servocommande hydraulique irréversible à double corps, elle-même commandée par l’intermédiaire de deux circuits électriques entièrement indépendants. Une troisième chaîne de commande du type mécanique classique constitue le circuit de secours. Pour augmenter le confort des passagers et les performances de vol tout en réduisant la tâche de l’équipage, on a incorporé aux chaînes de commandes électriques un dispositif de stabilisation entièrement doublé et indépendant du pilote automatique sauf pour les détecteurs (gyromètres). En cas de panne complète, d’ailleurs improbable, de la stabilisation artificielle, les essais sur simulateur ont montré que la maniabilité restait largement suffisante pour assurer le vol normalement.
A l’exception du trim électrique de profondeur, des mélangeurs pour les ordres envoyés aux élevons, et des dispositifs de non-linéarité sur la commande de gauchissement, le principe des liaisons entre les commandes au poste de pilotage et les gouvernes est le même pour les trois axes et pour chaque gouverne. Le déplacement par le pilote du manche et du palonnier agit sur le point d’entrée mécanique commun aux trois chaînes de commande pour le même axe qui est situé sous le plancher du poste. Le mouvement correspondant de ce point commun dépend de la force appliquée par le pilote mais aussi de la position du trim mécanique et de la charge restituée par le dispositif de sensation musculaire.
On sait que dans le cas de servocommandes irréversibles il faut des dispositifs de sensation artificielle pour restituer au niveau du manche et du palonnier une charge correspondant au déplacement imposé et aux conditions de vol. Sur le Concorde ces dispositifs montés sur les trois axes se composent principalement de vérins électro-hydrauliques asservis dont la force est réglée électroniquement en fonction de divers paramètres de vol. Les deux vérins prévus pour chaque axe sont reliés chacun à des circuits électriques, hydraulique et électronique différents pour assurer la sécurité. Une chaîne de surveillance compare sans cesse pour chaque vérin la force obtenue avec celle commandée. Un vérin défaillant est éliminé par coupure de la pression et mise à la bâche et la force de l’autre vérin est appliquée par le basculement d’un levier. A chaque jeu de vérins est associé un ensemble électronique de commande, d’asservissement et de surveillance.
Ce mouvement est communiqué aux revolvers de lecture de position des chaînes électriques qui fournissent un signal. Celui-ci est combiné dans un amplificateur d’asservissement renvoyé par la servocommande et au signal fourni par le dispositif de stabilisation automatique avant d’être appliqué à la servovalve de la servocommande.
Simultanément, le déplacement du point commun agit sur la chaîne mécanique en déplaçant la tête de bielle à ressort lié à une servocommande-relais nécessaire pour ramener les efforts de pilotage à un niveau agréable. C’est aussi à cette servocommande-relais que sont appliqués les ordres du pilote automatique qu’elle amplifie et transmet par la bielle à ressort aux commandes pilote et, de là, par le circuit normal, aux gouvernes. A la sortie de la servocommande-relais est placé un limiteur de couple qui limite la charge imposée à la commande mécanique et désengage aussi celle-ci en cas de grippage. Un régulateur de tension est prévu d’autre part pour compenser les variations de longueur des câbles dues à la dilatation. Le câble de commande mécanique attaque directement le levier d’entrée qui déplace le distributeur de la servocommande
Les deux corps d’une servocommande sont actionnés chacun par un circuit hydraulique différent. En cas de panne des circuits hydrauliques principaux vert et bleu, le circuit jaune de secours alimente les deux côtés de la servocommande. En fonctionnement normal, le signal de la servovalve correspondant au circuit hydraulique bleu a la priorité. Un système de surveillance entièrement doublé détecte les pannes par comparaison de la position des gouvernes. Si un élevon est décalé par rapport à ses deux voisins, le comparateur le commute ainsi que son symétrique d’une voie de commande à la suivante. Si les deux sections du gouvernail de profondeur sont décalées entre elles, elles sont commutées toutes deux sur une autre voie de commande. En cas de panne électrique ou hydraulique ne se traduisant pas par des différences relatives de position, ce sont des détecteurs dans les circuits respectifs qui commutent toutes les servocommandes d’une voie à la suivante. Dans un cas comme dans l’autre, la commutation s’effectue dans un temps très court sans changement appréciable d’équilibre de l’avion.
Sur la chaîne mécanique de commande des élevons, les mouvements transmis par les servocommandes-relais sont transformées par le mélangeur en deux ordres, l’un pour les élevons droits, l’autre pour les élevons gauches. En mode électrique, les ordres de roulis et de tangage sont combinés électriquement en utilisant les propriétés naturelles des résolvers. Enfin deux dispositifs de non-linéarité, l’un sur la commande mécanique, l’autre sur l’entraînement des résolvers de roulis, interviennent sur la commande de gauchissement pour améliorer la réponse autour de la position neutre.
Sur la profondeur un trim électrique est utilisé en plus de la compensation mécanique comme trim de mode automanette, trim de mach et d’incidence et pour annuler la sensation musculaire au désengagement du pilote automatique. Il est doublé, auto-contrôlé et indépendant du pilote automatique.
Circuit hydraulique.
Pour un circuit hydraulique utilisé dans les conditions de vol du Concorde deux questions se posaient en premier lieu, celles de la température et de la pression d’utilisation. C’est une pression d’utilisation nominale de 275 bars qui a été adoptée – principalement en fonction du poids des équipements et de leur temps de réponse (surtout en ce qui concerne les servocommandes). Quant à la température, l’ensemble du système hydraulique a été étudié pour fonctionner dans la plage – 40°C à + 120°C. Le maintien de la température du circuit dans ces limites est assuré par un échangeur de chaleur huile hydraulique/carburant monté sur les tuyauteries d’aspiration des pompes. On a choisi d’autre part une huile haute température qui peut supporter sans altération des températures variant de – 60°C à + 220°C et qui possède un module de compressibilité élevé.
Le circuit hydraulique se compose en fait de 3 circuits complètement indépendants et identifiés par un code de couleur : circuits vert et bleu normaux, et circuit jaune de secours.
Le circuit vert alimente en fonctionnement normal un demi-corps de chaque servocommande de gouverne, un demi-corps de chaque servocommande-relais, un vérin de sensation artificielle pour chacun des trois axes, le moteur hydraulique d’une pompe de transfert (réservoir carburant n° 10), quatre moteurs de commande des vérins d’entrées d’air (réacteurs 2 et 3). Il assure aussi la manoeuvre du train principal, de l’atterrisseur AV et de leurs trappes et de l’atterrisseur auxiliaire arrière, le freinage des roues principales, systèmes anti-dérapage compris, l’orientation des roues avant, la manoeuvre du nez basculant et de la visière.
Le circuit bleu alimente en fonctionnement normal l’autre demi-corps de chaque servocommande de gouverne et de chaque servocommande-relais, un vérin de sensation artificielle sur chacun des 3 axes, le moteur hydraulique de la 2ème pompe de transfert de carburant (réservoir n° 10), quatre moteurs de vérins de commande des entrées d’air (réacteurs 1 et 4).
Le circuit jaune, enfin, sert de circuit de secours pour les servitudes normalement assurées par le circuit vert et le circuit bleu à l’exception des sensations artificielles. Ce circuit alimente également, avec accumulateur, le freinage de détresse (sans anti-dérapage), les freins de parking, ainsi que le moteur hydraulique de la 3ème pompe de transfert de carburant.
La génération est identique pour les trois circuits. Sur chacun d’eux une bâche pressurisée à 4 bars par de l’air prélevé au réacteur alimente 2 pompes qui débitent dans un collecteur commun à travers un accumulateur. La pompe normale et la pompe de secours sont entraînées par des réacteurs différents pour le même circuit. L’entraînement des six pompes par les 4 réacteurs est d’ailleurs combiné de façon qu’il y ait toujours deux circuits sous pression en cas de panne de deux réacteurs quels qu’ils soient. La pompe normale débite 130 l/mn à 3750 t/mn, la pompe de secours deux fois moins. Celle-ci est mise normalement hors-circuit pendant le vol, sauf au décollage et à l’atterrissage où l’on peut avoir besoin du circuit jaune. Le débit des pompes normales verte et bleue permet à n’importe quel régime du réacteur le braquage de toutes les gouvernes à un taux voisin de 20°/s. Même avec panne complète de tous les réacteurs, l’énergie fournie par les pompes entraînées par les réacteurs tournant en moulinet suffit pour garder le contrôle de l’avion à haute altitude et lui faire prendre une trajectoire de descente ; elle assure aussi le fonctionnement des moteurs des pompes de transfert de carburant du réservoir arrière ce qui permet le déplacement du centre de gravité vers l’avant pour cette descente. A basse altitude, c’est le groupe auxiliaire (turbine de démarrage sur le réacteur N° 2) qui entraîne par l’intermédiaire du relais d’accessoires les deux pompes correspondantes, une normale et une de secours et pressurise les bâches. Il y a alors deux circuits sous pression pouvant assurer le fonctionnement de toutes les gouvernes à un taux d’au moins 4°/s.
Circuit électrique.
L’énergie électrique nécessaire aux servitudes et aux équipements de bord est fournie par 4 alternateurs sans balais de 40 kVA entraînés chacun par un des réacteurs par l’intermédiaire d’un dispositif d’entraînement à vitesse constante tournant à 8000 t/mn. Le courant alternatif est délivré sous forme de triphasé 400 Hz, 200 V pour les charges supérieures à 1 kVA ou de monophasé 115 V pour les charges inférieures à 1 kVA. Les 7 alternateurs alimentent 4 barres omnibus couplées par paires en parallèle lorsque les alimentations sont synchronisées. Il y a donc deux circuits alternatifs principaux, le “A” relié aux alternateurs gauches 1 et 2 et le “B” relié aux alternateurs droits 3 et 4.
A – commandes au poste de pilotage ; B – meubles électriques au-dessus du plancher, en avant des compartiments électriques principaux qui contiennent les deux convertisseurs statiques 26 V, 1800 Hz fournissant le courant aux deux chaînes électriques des commandes de vol. Ces convertisseurs sont alimentés par les barres batteries de l’avion. B1 – meuble droit ; B2 – meuble gauche. C – équipements sous plancher ; trim électrique (profondeur), trims mécaniques, sensations artificielles, servocommandes-relais et limiteur de couple (chaîne mécanique) et résolveurs (chaînes électriques) pour les trois axes. D – chaîne mécanique ; E1 E2 – chaînes électriques droite et gauche ; F – servocommande de direction ; G – servocommande élevon
Les besoins en courant continu 28 V sont assurés à partir des deux circuits alternatifs principaux par quatre transfo-redresseurs de 150 A (4 kW) qui alimentent deux barres principales continues de telle façon que chaque barre continue reçoit le courant de deux transfo-redresseurs branchés chacun sur un circuit alternatif différent. En secours, le courant nécessaire pour les servitudes essentielles est prélevé sur les barres de batterie – directement en ce qui concerne les charges continues et par l’intermédiaire de deux convertisseurs statiques pour les charges alternatives. D’autre part, une alimentation spéciale alternative monophasée à 26 V, 1800 Hz est utilisée pour les circuits des commandes de vol ; elle est assurée en permanence à partir des barres batteries par deux autres convertisseurs statiques.
La charge normale de chaque circuit alternatif est de 40 kVA auxquels s’ajoutent 25 kVA en cas de dégivrage des ailes et des entrées d’air. On a donc dans ce dernier cas 32,5 kVA par génération. En cas de panne d’un alternateur, la charge est répartie entre les 3 restants de qui l’on tire alors individuellement 45 kVA ce qui reste dans leur capacité aux températures correspondant aux conditions de givrage, en vol subsonique.
Dans le cas de panne simultanée de 2 alternateurs alimentant 2 circuits différents, le dégivrage des ailes et des entrées d’air ne peut plus être assuré mais le reste des servitudes continue à être alimenté normalement. Si les deux alternateurs en panne sont ceux du même circuit, seuls restent alimentés les équipements essentiels grâce à des commutateurs les branchant automatiquement sur l’autre circuit.
Le dispositif de secours pour le cas de panne complète (extinction des 4 réacteurs par exemple) comprend des batteries au cadmium-nickel dont la capacité est suffisante à la fois pour assurer pendant un laps de temps les fonctions électriques vitales (lorsque la vitesse des réacteurs tournant en moulinet devient insuffisante et que les dispositifs de protection de sous-fréquences des alternateurs désaccouplent ceux-ci) et pour démarrer le groupe auxiliaire. Celui-ci, alimenté par son propre circuit de carburant, entraîne alors un alternateur par le relais d’accessoires du réacteur correspondant.
Conditionnement d’air.
Alors que sur les avions de ligne subsoniques le conditionnement d’air avait surtout pour but de fournir de la chaleur aux passagers, le problème est au contraire sur le Concorde de maintenir à l’intérieur de la cabine un température suffisamment basse pour être confortable, en dépit de l’échauffement cinétique des parois extérieures portées en croisière à 120°C.
Par mesure de sécurité le conditionnement d’air et la pressurisation sont assurés par quatre circuits séparés alimentés chacun par de l’air prélevé via un détendeur au dernier étage du compresseur HP d’un réacteur. Un débit total d’air de 1,36 kg/s est ainsi assuré.
L’air qui sort à 580°C est refroidi à 200°C dans un premier échangeur air/air utilisant de l’air prélevé soit directement à l’extérieur, soit à l’entrée d’air moteur. Une trompe à effet venturi permet d’accélérer l’écoulement de l’air de refroidissement dans l’échangeur aux basses vitesses. En amont et en aval de cet échangeur qui peut être by-passé si les températures extérieures sont très basses, on a prévu le montage respectivement d’un dissociateur d’ozone et d’un filtre de particules radioactives.
En sortant du premier échangeur, l’air de conditionnement est comprimé dans le groupe turbo-réfrigérateur avant d’être envoyé à un deuxième échangeur air/air semblable au premier. De là il passe à la température de 190°C dans un échangeur air/carburant. Une vanne contrôle le débit carburant alimentant ce dernier échangeur de façon que la température de l’air à sa sortie ne tombe pas en dessous de + 15°C ; d’autre part elle coupe le carburant si la température de celui-ci à l’entrée de l’échangeur se trouve être supérieure à celle de l’aile. Ce dernier passe enfin dans la turbine du groupe turboréfrigérateur où il est détendu et où sa température tombe à – 30°C.
A la sortie de la turbine, l’air froid est mélangé à de l’air chaud pris en amont du groupe turboréfrigérateur par la vanne de régulation de température et il est distribué ensuite au poste de pilotage et à la cabine comme décrit dans les légendes des figures illustrant la page suivante.
Pour chaque circuit une surchauffe ou une surpression détectée par thermo-contacts et mano-contacts entraîne la fermeture de la vanne de prélèvement au compresseur. La régulation de la température à la valeur affichée (entre + 15°C et + 30°C) se fait automatiquement par système électronique agissant sur l’ouverture de la vanne de régulation ou directement par commande manuelle de cette vanne. De même, la régulation de la pression cabine est assurée par commande automatique ou manuelle de deux soupapes de décharge.
Séparateur d’eau Bronzavia destiné à retirer une grande partie de l’eau contenue dans l’air d’alimentation de la cabine afin de maintenir un degré hygrométrique convenable pour le confort de l’équipage et des passagers. L’humidité absolue atteinte correspond à 19 g d’eau par kg d’air sec. Une commande par vérin électromécanique met le séparateur hors circuit au-dessus de 9000 mètres, altitude à partir de laquelle l’atmosphère est exempte d’eau. Chaque séparateur est conçu pour un débit d’air de 25 kg/mn.
Après s’être débarrassé de son humidité dans les séparateurs d’eau, l’air des quatre circuits de conditionnement arrive par 4 clapets anti-retour à une rampe commune aux 4 circuits, ce qui, en cas de panne de l’un deux, permet de répartir proportionnellement le débit restant. Quatre conduites partent de cette rampe pour alimenter le poste de pilotage et la cabine passagers.
Pour le poste de pilotage, l’air frais arrive par un conduit gauche et un conduit droit qui se séparent en deux branches. La branche principale monte vers le haut où elle suit horizontalement la paroi, au niveau du bord supérieur du pare-brise ; elle assure la ventilation de celui-ci par écoulement d’air sur la face interne et participe en même temps à la ventilation générale. L’autre branche souffle de l’air frais à mi-hauteur environ.
Une partie de l’air évacué du poste de pilotage (35%) va refroidir les compartiments électriques et électroniques. Une autre partie est évacuée le long des parois et passe sous le plancher. Enfin de l’air est évacué au niveau des commandes et du pupitre central.
Pour la cabine passagers, les conduits partant de la rampe de répartition délivrent de l’air frais dans les gaines verticales placées contre les parois du fuselage. Ces gaines verticales placées contre les parois du fuselage. Ces gaines verticales alimentent des tuyauteries placées horizontalement le long des porte-chapeaux. Ces dernières distribuent l’air par de petites bouches situées sur la face inférieure des porte-chapeaux ainsi que par les bouches individuelles d’air froid des panneaux passagers, sous les porte-chapeaux. L’air frais prélevé pour refroidir la face interne du panneau de plexiglas de chaque hublot afin de limiter l’échauffement par rayonnement à travers les hublots est envoyé ensuite dans la cabine où il débouche par les mêmes points. L’arrivée d’air frais entraîne une circulation générale de l’air en cabine. Celui-ci est, pour sa plus grande partie (environ 70%), évacué par le plafond. De là il redescend le long des parois du fuselage, canalisé entre l’habillage intérieur de la cabine et le matelas d’isolation thermique de la cabine et de la soute à bagages inférieure. Le restant de l’air de la cabine sort par des grilles au niveau du plancher et est envoyé de là au bas des compartiments électroniques.
Circuit carburant.
L’importance et la relative complexité du circuit carburant sur le Concorde viennent du triple rôle qu’il doit assumer. En plus de sa fonction normale d’alimentation des réacteurs, il doit en effet servir de source froide pour l’évacuation des calories en excès dans les autres circuits et il est utilisé par ailleurs pour modifier le centrage de l’avion aux divers régimes de vol. Il faudrait à la vérité plusieurs pages pour traiter en détail du fonctionnement de ce circuit dont nous ne pouvons donner ici qu’une description succincte.
Comme on peut le voir sur le schéma de la page suivante, il y a dix-sept réservoirs structuraux de carburant occupant environ 60% du volume des ailes et près de la moitié du volume disponible dans le fuselage sous plancher. Les réservoirs sont classés en 3 groupes : les réservoirs d’équilibrage 1, 2 et 10 et les réservoirs re-circulation air évacué air frais ventilation principaux gauches et droits. Le groupe gauche comprend les réservoirs de voilure, 3, 4, 5, 6, 7 et le réservoir central avant de fuselage 8 ; le groupe droit comprend les réservoirs de voilure symétriques des précédents 3, 4, 5, 6 et 7 et le réservoir central arrière de fuselage 9. Dans les deux groupes principaux, les réservoirs 3 et 6 font fonction de nourrices pour les réacteurs situés du même côté, le 3 alimentant normalement le réacteur interne et le 6 le réacteur externe mais un circuit d’interconnexion permet, le cas échéant, à n’importe quelle nourrice d’alimenter n’importe quels réacteurs.
Pour compenser le déplacement du centre de poussée vers l’arrière lorsque l’on passe du vol subsonique au vol supersonique, on déplace le centre de gravité de l’appareil en transférant du carburant de l’avant vers l’arrière. En fin de croisière supersonique par contre, il faut ramener le CG vers l’avant par un nouveau transfert de carburant en sens inverse. Ce sont les réservoirs d’équilibrage avant (1 et 2) et arrière (10) qui sont utilisés à cet effet, mais du carburant est également envoyé au cours de ces opérations dans les deux groupes de réservoirs principaux par l’intermédiaire des réservoirs centraux 8 et 9. Un double circuit de transfert, gauche et droit, relie ces réservoirs. C’est à ce circuit de transfert que sont raccordés les quatre prises de remplissage et c’est aussi sur ce circuit qu’est branché le système de vide-vite.
Chaque réservoir principal contient deux pompes électriques reliées chacune à l’une des deux nourrices du groupe. Seuls les réservoirs extrêmes (N° 7) qui sont maintenus pleins pendant toute la phase de montée et d’accélération transsonique pour réduire le moment de flexion de l’aile, ne sont reliés qu’à la nourrice voisine. La séquence d’utilisation des réservoirs principaux est réglée entre le côté gauche et le côté droit de façon à ne pas changer le centrage de l’appareil pendant tout le vol de croisière. Cette séquence est commandée par des clapets-pilotes à flotteurs placés dans chaque nourrice à des niveaux différents et actionnant les robinets des tuyauteries d’arrivée de chaque réservoir. Les réservoirs principaux pouvant être pleins pendant une grande partie du vol de croisière sont équipés en vue d’une dilatation thermique du carburant de tuyauteries de trop-plein se déversant dans les nourrices.
Chaque nourrice est dotée de 3 pompes BP, une pompe principales et 2 pompes de secours, branchées chacune sur une barre omnibus alternative différentes et capables indépendamment d’assurer l’alimentation d’un réacteur sans postcombustion. Les 2 pompes de secours sont utilisées aussi pour la vidange de carburant en vol (en subsonique seulement). Elles débitent alors dans le circuit de transfert d’équilibrage, la pompe principale continuant à alimenter le réacteur. Chaque nourrice contient un accumulateur de carburant de 18 litres environ qui est mis sous pression par prélèvement d’air comprimé au réacteur et qui entre en action en cas d’accélération négative lorsqu’une baisse de pression se produit à la sortie de la pompe réacteur. La nourrice droite N° 6 comporte en plus un petit réservoir sans couvercle placé de façon à être submergé avec les réserves normales de carburant et permettant en toutes circonstances l’alimentation du groupe auxiliaire de démarrage monté sur le réacteur n° 2.
Un circuit de mise à l’air libre et de pressurisation, auquel sont reliés tous les réservoirs (à l’exception du n° 10 maintenu en permanence à la pression ambiante), fait le tour de l’appareil et aboutit à l’arrière à un réservoir où une pompe de récupération renvoie le carburant entraîné à la nourrice n° 6. Ce réservoir est relié à 2 orifices de mise à l’air libre situés de part et d’autre du cône arrière par 2 clapets qui se ferment au-dessus de 13.400 mètres. Une vanne de régulation de pression maintien alors la pression dans les réservoirs à 105 mb absolus.
Le système de remplissage qui utilise les tuyauteries de transfert d’équilibrage (cf. schéma) est étudié pour permettre d’effectuer les pleins en 20 minutes à partir des réserves normales (9070 kg). La pression de remplissage est limitée dans les tuyauteries à 0,7 bar.
On a vu que le carburant était utilisé comme source de froid pour refroidir l’air de conditionnement prélevé aux réacteurs et le liquide hydraulique. Ces deux circuits ont leurs échangeurs placés en parallèles sur l’alimentation en carburant des réacteurs, entre la nourrice et la cloison pare-feu. Une vanne de dérivation limite le débit dans ces échangeurs à 3175 kg/h, ce qui correspond aux besoins en carburant des réacteurs en fin de croisière. Toute la chaleur rejetée passe alors dans les réacteurs. Mais en décélération et en descente le débit demandé par les réacteurs étant trop faible, une vanne de remise en circulation empêche le débit dans les échangeurs de tomber en dessous de 3175 kg/h en renvoyant à la nourrice une partie du carburant. Il y a également des échangeurs de chaleur pour l’huile alternateur/entraînement à vitesse constante et l’huile moteur qui sont montés en amont de la pompe HP et dans lesquels le débit de carburant est limité à 5400 kg/h.
Le déplacement du centre de gravité par transfert de carburant entre les réservoirs d’équilibrage avant et arrière est expliqué brièvement dans la légende accompagnant le schéma. Ajoutons seulement que le CG se situe approximativement à 52,5% de la corde de référence au décollage et à l’atterrissage tandis qu’il doit être à 57% de cette corde en croisière supersonique. Le transfert de carburant en cours d’accélération s’effectue en deux étapes. La première – de 0,7 Mach à 1,8 Mach environ – doit permettre une décélération d’urgence sans nécessiter un transfert vers l’avant. La deuxième commence à 1,8 Mach et continue jusqu’à l’épuisement des réservoirs avant qui coïncide avec un centrage à 57%. Sauf dans le cas de vol avec charge marchande minime tout le carburant d’équilibrage est consommable. Les opérations de transfert d’équilibrage peuvent être réalisées automatiquement ou manuellement. Elles sont contrôlées à partir du tableau carburant placé au poste mécanicien, à l’aide des jaugeurs et indicateurs de centrage. On peut également, sur ce tableau, suivre le transvasement des réservoirs principaux dans les nourrices pendant le vol de croisière.
8 – Groupe turboréacteurs.
Le réacteur de Concorde doit répondre à des conditions opérationnelles très variées telles que décollage, montée subsonique, accélération transsonique, croisière supersonique, descente et attente subsonique. Une exigence primordiale est celle de la poussée en croisière supersonique et elle est liée à une consommation spécifique qui doit être faible, non seulement en croisière, mais aussi en déroutement subsonique et durant l’attente.
Le propulseur se compose de trois ensembles : l’entrée d’air, conçu par British Aircraft Corporation ; le réacteur Bristol Siddeley Olympus 593 ; le canal d’éjection, étudié et réalisé par la SNECMA.
Chaque réacteur possède sa propre entrée d’air de forme rectangulaire, définissant ainsi un système de compression bi-dimensionnel. La compression supersonique est effectuée extérieurement en réduisant la vitesse de l’air au moyen d’un contrôle de choc, jusqu’à l’obtention d’un écoulement subsonique. Ensuite, ayant réduit le nombre de mach de sa vitesse au-dessous de l’unité, l’air est comprimé dans un diffuseur subsonique jusqu’à une vitesse acceptable pour le réacteur.
L’efficacité dans toute sa gamme des vitesses est réalisée en incorporant une rampe à pente variable à la partie supérieure du col d’entrée. Celle-ci comprend deux parties mobiles pouvant être élevées ou abaissées de façon à faire varier la section du col en fonction du nombre de mach.
Une porte auxiliaire est prévue dans le plancher de chaque entrée. Elle s’ouvre vers l’arrière pour écouler l’excès d’air pouvant exister entre le débit d’air admis par l’entrée et celui demandé par les réacteurs. Actionnée en sens contraire, cette porte, qui est articulée à ses deux extrémités, fournit un moyen efficace pour augmenter le débit de l’entrée d’air lors des roulages, décollages et vols subsoniques.
L’Olympus 593 est un turboréacteur de conception classique ayant une poussée nominale statique au niveau de la mer de 15.900 kilos, sans réchauffe. Pendant les deux premières années de service, la poussée nominale sans réchauffe sera limitée à 14.900 kilos, mais durant cette même période la poussée au décollage sera augmentée de 9% par la réchauffe. Après deux ans de service la poussée nominale sans réchauffe atteindra 15.900 kilos et la réchauffe ne sera plus utilisée, sauf en cas de besoin au décollage ; la poussée totale sera alors de 17.300 kilos.
Le débit massique d’air de l’Olympus 593 est plus élevé que sur les versions antérieures de l’Olympus. Le moteur est conçu pour un fonctionnement prolongé à hautes températures. Les aubes du stator et du rotor de la turbine haute pression sont refroidies par air car la température d’entrée à la turbine atteint 1150°C.
L’ensemble d’éjection est conçu pour assurer un rendement maximum en croisière supersonique et un rendement élevé en vol subsonique, en particulier pendant les attentes. Chaque ensemble comprend deux tuyères. La tuyère primaire convergente à commande pneumatique a une section variable modifiable par volets multiples. La tuyère secondaire a aussi une section variable à volets multiples, mais est un élément divergent dans lequel est incorporé un silencieux rétractable. Elle est flottante, avec un amortisseur approprié, afin de lui permettre de prendre la position optimale pour toutes les conditions de vol. En vol subsonique, le rendement de l’ensemble tuyère est augmenté par l’ouverture de portes tertiaires situées juste devant le col de la tuyère primaire.
La fonction principale du système de réchauffe est d’augmenter la poussée au décollage. Le système principal de commande du réacteur maintien le taux de détente des turbines à une valeur prédéterminée en faisant varier la section de la tuyère. Les variations de débit de carburant de la réchauffe sont accompagnées de changements de la section tuyère.
La pression ambiante relativement basse existant dans la buse où fonctionne la réchauffe, lui permet d’utiliser une alimentation en carburant à basse pression. Le carburant est prélevé directement à la sortie du premier étage de la pompe ; de là, il passe à l’anneau de réchauffe situé dans la buse, l’allumage se faisant par bougie haute tension.
Une vanne de commande, manoeuvrée électriquement, contrôle le débit de carburant au moment de l’allumage, régule l’augmentation de débit entre l’allumage et la puissance maximum et pendant le fonctionnement à la puissance maximum.
L’Olympus 593 est un turboréacteur à deux rotors et à écoulement axial. Il comporte un compresseur basse pression à sept étages et un compresseur haute pression à sept étages. Chaque compresseur est entraîné par une turbine à un seul étage. L’ensemble turbine a été redessiné afin d’incorporer un système de refroidissement du stator et des aubes du premier étage. Le refroidissement éventuel du deuxième étage est prévu. A cause des températures élevées atteintes par le réacteur, la partie avant du compresseur haute pression est en titane et sa partie arrière en alliage réfractaire. Le compresseur basse pression est en titane.
Emplacement des accessoires sur l’Olympus 593.
Côté gauche du moteur. 1 – support moteur ; 2 – refroidisseur d’huile réacteur ; 3 – refroidisseur d’huile du système d’entraînement à vitesse constante ; 4 – support moteur ; 5 – circuit carburant avec pompe haute pression ; 6 – pompe basse pression ; 7 – filtre carburant basse pression ; 8 – réservoir d’huile.
Côté droit du moteur. 9 – réservoir d’huile ; 10 – pompe hydraulique (petite) ; 11 – support moteur ; 12 – alternateur ; 13 – support moteur ; 14 – système d’entraînement à vitesse constante ; 15 – relais d’accessoires ; 16 – démarreur à turbine à gaz ; 17 – pompe hydraulique (grosse).
Un Olympus 593 au banc d’essais couvert de la SNECMA à Melun-Villaroche. La tuyère a été enlevée pour montrer l’élément primaire convergent à section variable. Les vérins de commande pneumatique des volets de la tuyère sont disposés par paires autour du canal d’éjection. L’installation complète comporte un inverseur de poussée à commande pneumatique formé de deux écrans pivotant dans le jet à l’arrière de la tuyère primaire.
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Décollage. 1 – rampes mobiles relevées ; 2 – vanne du conduit de ventilation fermée ; 3 – volet de décharge ouvert pour augmenter le débit d’air ; 4 – volet d’air de refroidissement du compartiment réacteur ouvert ; 5 – volet de décharge arrière fermé ; 6 – portes tertiaires ouvertes ; 7 – tuyère secondaire en position convergente.
Accélération transsonique. 1 – rampes mobiles relevées ; 2 – vanne de conduit de ventilation ouverte ; 3 – volet de décharge fermé ; 4 – volet d’air de refroidissement fermé ; 5 – volet de décharge arrière fermé ; 6 – portes tertiaires ouvertes ; 7 – tuyère secondaire flottante.
Croisière à Mach 2,2. 1 – rampes mobiles abaissées ; 2 – vanne du conduit de ventilation ouverte ; 3 – volet de décharge ouvert à l’arrière ; 4 – volet d’air de refroidissement fermé ; 5 – volet de décharge arrière ouvert ; 6 – portes tertiaires fermées ; 7 – tuyère secondaire en position divergente.
Un Olympus 593 au banc d’essais à l’air libre de la SNECMA à Melun-Villaroche. L’ensemble d’éjection complet de la SNECMA est monté derrière le moteur. La tuyère secondaire est ouverte (configuration supersonique). Cette tuyère est flottante, avec un amortissement approprié, ce qui lui permet de prendre la position optimale pour toutes les conditions de vol.
9 – Equipements de pilotage, de navigation et de communication.
Système de pilotage automatique.
Les sociétés Sud-Aviation et BAC proposent actuellement deux formules pour le pilotage automatique du courrier supersonique Concorde.
La première solution consiste à utiliser un seul PA à circuits d’autovérification, plus deux calculateurs de directeur de vol. Les deux calculateurs sont indépendants et reçoivent, l’un des informations issues des sources qui alimentent le PA, l’autre des informations provenant de sources totalement distinctes. Les indications correspondantes sont fournies aux divers instruments de pilotage du tableau de bord.
La deuxième solution prévoit l’installation de deux PA indépendants et d’un seul calculateur de directeur de vol commandant en parallèle les indicateurs pilote et copilote. Les deux PA reçoivent leurs informations de sources distinctes et un seul assure le contrôle effectif, le second se synchronisant sur le premier pour intervenir en cas de panne par commutation automatique.
Dans les deux versions, le système de pilotage automatique est complété par deux visualiseurs d’atterrissage montés sur le tableau de bord (pilote et copilote) et les deux manches sont équipés d’une commande permettant de déconnecter le PA.
Pour ce qui concerne l’axe longitudinal, le pilote automatique peut être utilisé dans les modes manuels, maintien d’altitude, maintien de Mach, maintien de vitesse, vitesse verticale, acquisition d’altitude, navigation verticale et atterrissage (glide manuel, glide automatique, land ou remise de gaz). Pour l’axe latéral, il existe les modes manuels, sélection de route et de cap, navigation latérale et VOR/LOC. Les modes du directeur de vol sont identiques à ceux du PA, à l’exception des modes manuel.
Un système double d’automanettes à circuits d’autovérification est prévu en outre pour assurer les fonctions suivantes : maintien du nombre de Mach, maintien de la vitesse et sélection de vitesse. Ce système est complètement indépendant du PA. Normalement une seule des deux voies est active, l’autre étant en synchronisation permanente pour éventuellement suppléer la première pendant l’atterrissage. Si nécessaire, le pilote ou le copilote peut rendre les automanettes instantanément inopérantes.
L’ensemble de pilotage automatique comprend également un autostabilisateur doublé et surveillé, ainsi qu’un compensateur électrique qui assure automatiquement le trim lorsque le PA est enclenché, en particulier dans la phase transsonique du vol.
Deux centrales aérodynamiques indépendantes à triple système de surveillance transmettent au PA et à divers autres équipements de bord les informations ci-après : altitude pression, température statique, température totale, vitesse corrigée, vitesse propre, nombre de Mach, vitesse ascensionnelle, angle d’incidence, angle de dérapage, Mach et vitesse maxi, admissibles, maintien d’altitude et maintien de Mach. Chaque centrale est reliée à plusieurs sondes et à deux capteurs qui mesurent les pressions statique et dynamique.
Le système de pilotage automatique complet à été étudié et mis au point par la firme britannique Elliott, en coopération avec l’entreprise française SFENA et l’Eclipse Pioneer Division de la société américaine Bendix. La SFENA fabrique divers sous-ensembles du PA et l’horizon du directeur de vol, tandis que Bendix réalise entre autres les circuits électroniques miniaturisés et la commande double de compensateur. La centrale aérodynamique a été conçue et réalisée par le fabricant français Crouzet en collaboration avec la Navigation and Control Division de Bendix.
1 – vérin de trim électrique ; 2 – système de sensations artificielles ; 3/4/5 – détecteurs-relais (tangage, roulis, lacet) ; 6/7 – calculateurs de trim électrique ; 8 – actionneur de l’automanette ; 9/10 – calculateurs de l’automanette ; 11 – calculateur de l’autostabilisateur (lacet) ; 12/13 – calculateurs de l’autostabilisateur (tangage et roulis) ; 14 – calculateur de l’autostabilisateur (lacet) ; 15 – accéléromètre d’axe longitudinal ; 16 – gyromètre (lacet) ; 17 – gyromètre (tangage) ; 18/19 – gyromètres (roulis) ; 20 – gyromètre (tangage) ; 21 – gyromètre (lacet) ; 22 – calculateur du directeur de décollage et de remise des gaz ; 23/24 – calculateurs du directeur de vol (chaînes latérale et longitudinale) ; 25/26 calculateurs du PA (chaînes latérale et longitudinale) ; 27/28 – calculateurs du PA (chaînes longitudinale et latérale) ; 29/30 – calculateurs du directeur de vol (chaînes longitudinale et latérale) ; 31 – bloc à bande magnétique de l’enregistreur accident ; 32/33 – calculateurs de l’enregistreur accident ; 34 – calculateur de nombre de Mach (secours) ; 35 – transmetteur de débit carburant
Système de navigation.
Pour les besoins de la navigation, les constructeurs de Concorde ont adopté un système de base, auquel il sera possible d’adjoindre un certain nombre d’équipements optionnels. Il s’agit d’un système dont les informations sont aisément exploitables par les deux pilotes (sans le concours d’un navigateur) et qui peut être utilisé dans n’importe quelle partie du monde, de jour ou de nuit, avec ou sans aide extérieure. Conçu pour être couplé au PA et au directeur de vol, ce système fournit la position absolue de l’avion, la position de celui-ci par rapport à la route orthodromique imposée ainsi que les heures estimées d’arrivées aux points de survol et de destination choisis. Il permet en outre de suivre un profil de vol déterminé dans le plan vertical et de modifier presque instantanément la route pour éviter les perturbations atmosphériques ou pour tout autre raison.
Le système comprend notamment deux plates-formes gyroscopiques à inertie, deux calculateurs de navigation numériques, un indicateur cartographique de route appelé routier automatique, une plate-forme non inertielle à deux gyroscopes, deux ensembles VOR/ILS/DME, un ensemble Doppler, deux récepteurs de radiobalise, un émetteur-récepteur de radar météorologique, deux altimètres radio de basse altitude et deux indicateurs de situation horizontale. Parmi les équipements optionnels actuellement prévus, on peut citer un ensemble de radionavigation à la longue distance du type LORAN C, une troisième plate-forme à inertie (avec calculateur digital associé) remplaçant la plate-forme bigyro, un double équipement ADF et un deuxième radar météorologique. En outre, un équipement Omnitrac de Decca doit être expérimenté sur un prototype du Concorde.
L’équipement de navigation à inertie, qui porte la désignation SF-500-AE51, a été mis au point conjointement par la firme française SAGEM et le fabricant britannique Ferranti. Il se compose essentiellement d’une plate-forme de référence équipée de gyroscopes et d’accéléromètres, d’un calculateur digital et d’organes assurant l’affichage des données et la liaison avec d’autres équipements de bord. Ce système fournit les références d’assiette et d’azimut, effectue les calculs de navigation et certains autres calculs, réalise l’alignement initial de façon autonome (références de verticale et direction du Nord), détecte les pannes de ses propres circuits et fonctionne de manière impeccable en navigation circumpolaire. Dans le mode normal, la plate-forme inertielle est maintenue horizontale suivant le principe Schuler, et son orientation en azimut s’effectue à un taux de précession égal à la composante verticale de la rotation terrestre ; un mode de fonctionnement secours est également prévu.
La SAGEM a coopéré avec Ferranti à la réalisation de l’équipement de navigation à inertie SF-800-AE51 qui utilise les techniques les plus modernes (circuits intégrés et câblage multicouche, mémoire sur palier à air, etc.). Ce système se compose d’une plate-forme gyroscopique et d’un bloc électronique formant la centrale inertielle (à l’arrière plan) et d’un calculateur numérique avec une unité d’entrée et de sortie, plus une boîte de commande et d’affichage. Le poids total de ces cinq sous-ensembles est d’environ 49 kg. La formule plate-forme gyroscopique à inertie avec calculateur numérique associé a été retenue pour trois raisons principales. Premièrement, un avion comme le Concorde est soumis à des accélérations très importantes et, de ce fait, seule une plate-forme inertielle peut fournir la référence de verticale avec la précision requise. Deuxièmement, le Concorde a besoin d’une référence de cap extrêmement précise, ce qui nécessite un système capable de trouver la référence du Nord de manière entièrement autonome et de conserver cette référence pendant tout le vol. Troisièmement, pour connaître les heures d’arrivée exactes, il faut un équipement pouvant déterminer la position et la vitesse à chaque instant. Le système SF-500-AE51 remplit parfaitement toutes ces conditions.
Le routier automatique a été conçu et réalisé par Ferranti. Cet équipement, installé sur la planche de bord centrale, indique continuellement la position de l’avion sur la carte et permet de comparer les données fournies par les différents systèmes, facilitant ainsi la conduite de la navigation et la transmission des messages de position. Le boîtier de l’indicateur contient 10 mètres de film de 35 mm, couvrant sur la carte une superficie de 8000 x 2000 milles marins (échelles 1/5.000.000 et ½.000.000 pouvant être doublées par voie optique). Il est possible de faire apparaître la position de l’avion au centre de la carte ou de la décaler au bas du cadran pour augmenter le champ vers l’avant. D’autre part, la carte peut être orientée soit vers le Nord, soit dans le sens de la route.
C’est l’entreprise française SFIM qui fabrique la plate-forme gyroscopique non inertielle, installée à bord du TSS franco-britannique dans le but de permettre des recoupements et d’accroître le taux de sécurité. Il s’agit de l’équipement type CCV 1533 dont les deux gyroscopes à deux degrés de liberté fournissent, l’un les informations de cap, l’autre les informations de roulis et de tangage. La plate-forme est reliée à l’indicateur sphérique type 805 qui est livré par le même fabricant.
Le récepteur de navigation VOR/ILS porte la désignation NC 250. Il a été mis au point par la firme française CSF suivant la recommandation ARINC 547. Son originalité réside dans le doublement des circuits basse fréquence en ILS et dans l’emploi d’un circuit de surveillance, qui assure la comparaison automatique et permanente des informations issues des circuits doublés. Le récepteur VOR/ILS est complété par le DME type AD-70 produit par le fabricant britannique Marconi, qui fournit par ailleurs l’équipement Doppler AD-560. Une autre firme britannique, la société White & Nunn, réalise la boîte de commande (affichage numérique des fréquences) pour l’ensemble VOR/ILS/DME, laquelle permet aussi de contrôler l’amplitude de modulation des postes VHF. L’antenne DME/ATC est fournie par l’entreprise française STAREC, comme d’ailleurs celle du récepteur de radiobalise.
Le récepteur de radiobalise choisi pour le Concorde est un matériel nouveau transistorisé, donc de dimensions très réduites. Il est fabriqué sous la désignation MKA-28C par Bendix, qui fournit en outre le radiocompas DFA-73-A. Ce dernier équipement, également transistorisé, couvre la gamme de 190 à 1750 kHz en trois bandes ; le réglage de la fréquence est facilité par annulation des battements et rendu plus net que sur les matériels classiques.
Le fabricant britannique EKCO réalise le radar météorologique E390 qui peut être utilisé aussi pour la figuration du terrain. L’émetteur-récepteur fonctionne dans la bande X ; à l’exception des composants micro-ondes tous ses éléments sont transistorisés. Le boîtier ATR de l’émetteur contient également les circuits récepteurs. Les circuits de commande d’antenne pour la stabilisation du faisceau radar en roulis et en tangage sont incorporés à l’ensemble. L’antenne, logée dans la pointe avant de l’avion, émet un faisceau de 2°7, balayant un secteur de + 60° en azimut et un secteur de + 35° en site. Elle est conçue pour fonctionner aux températures allant de – 60 à + 135°C et ses commandes sont doublées.
L’indicateur a un écran de 13 cm de diamètre et permet le choix de trois échelles correspondant aux distances de 50, 100 et 200 milles marins.
Le radioaltimètre du Concorde est une réalisation de la société française TRT. Il s’agit de l’équipement à modulation de fréquence (4300 MHz) type AHV 5, dont les circuits de sortie sont doublés et surveillés. Le système de commutation est lui-même surveillé, ainsi que les circuits détecteurs de panne. Un voyant lumineux s’allume lorsque l’avion vole au-dessous d’une altitude affichée sur l’indicateur. Le radioaltimètre TRT est conçu pour être intégré dans le système d’atterrissage automatique du Concorde.
Equipements de télécommunications et de communications intérieures.
En ce qui concerne les télécommunications, l’équipement de base du Concorde se compose de deux émetteurs-récepteurs VHF, de deux émetteurs-récepteurs HF, d’un décodeur Selcal à deux voies et d’un répondeur de radar secondaire. D’autre part, des emplacements sont prévus à bord de l’avion pour un deuxième répondeur, un deuxième décodeur et un troisième VHF.
L’équipement VHF et le répondeur de radar secondaire sont fournis par SEDELEC-Wilcox. Le poste VHF type 807 possède 1360 canaux espacés de 25 kHz dans la gamme de 116 à 150 MHz, tandis que le répondeur type 914A offre 4096 codes dans les modes A, B, C et D. La firme américaine Collins fabrique l’émetteur-récepteur HF type 618T qui est un poste à 28.000 canaux fonctionnant dans la gamme de 2 à 30 MHz ; cet ensemble à bande latérale unique est conçu pour le changement de fréquence au moyen d’une commande à distance. Enfin, c’est Marconi qui a mis au point le décodeur Selcal AD-900, lequel peut être connecté aux équipements VHF et HF.
L’équipement pour les communications intérieures comprend trois postes principaux (avec possibilité d’extension à cinq) pour l’exploitation des moyens radios, les liaisons par l’interphone de bord et par l’interphone de service. Ce dernier, destiné à faciliter l’entretien au sol, permet des communications entre le poste de pilotage et différents points de l’avion, tels que, atterrisseurs, soutes, nacelles réacteurs, prises électriques de parc, etc. Un réseau de sonorisation est prévu en outre pour les annonces aux passagers et la diffusion de musique. Tous ces systèmes ont été conçus et réalisés par la firme française TEAM.
Instruments de vol et de contrôle.
Les trois principaux fournisseurs d’instruments pour le Concorde sont les sociétés Jaeger (France), Kollsman et Smiths (Grande-Bretagne). Pour l’avion de série, le fabricant français livre les équipements suivants : un indicateur de comparaison automatique des paramètres moteurs, quatre indicateurs quadruples à échelle rectiligne, un anémo-machmètre de secours, six indicateurs de jaugeur de bâche hydraulique, six indicateurs de température de conditionnement d’air, quatre indicateurs de pression hydraulique,un indicateur double de pression hydraulique, neuf instruments pour le circuit d’oxygène et douze échangeurs thermiques de conditionnement d’air (licence Hawker Siddeley) ; par ailleurs, chaque prototype du Concorde possède dans l’installation essais en vol, 92 instruments portant la marque Jaeger.
La société Kollsman fabrique, quant à elle, douze types d’instruments, à savoir un altimètre de secours, un indicateur d’altitude cabine, d’altitude de vol et de pression différentielle, un indicateur d’altitude cabine et de pression différentielle, un variomètre de cabine, un servo-altimètre, un servo-machmètre, un servo-anémomètre, un thermomètre double température ambiante/température d’arrêt, un indicateur double d’angle d’attaque et d’accélération (échelles rectilignes), un indicateur de dérapage, un accéléromètre à distance et un manomètre de réservoirs de carburant.
Enfin, Smith fournit un détecteur de givrage et un indicateur radio-magnétique pour l’avion lui-même, ainsi que des mano-contacts, des manomètres à distance et des indicateurs de vitesse pour les réacteurs Olympus
10 – L’exploitation de Concorde.
Aucun appareil commercial n’avait encore créé autant de polémiques et suscité de critiques que l’avion de transport supersonique franco-britannique. Dénigrer le Concorde est un passe-temps très en vogue chez un certain nombre de correspondants aéronautiques du Royaume-Uni et dans diverses sphères de l’industrie du transport aérien ; certains doivent espérer que les essais en vol, qui doivent débuter prochainement, révèleront des défectuosités importantes justifiant le bien-fondé de leurs critiques. En revanche, un certain nombre d’enthousiastes, tant en France qu’au Royaume-Uni, croient fermement que le projet à la mise en oeuvre duquel ils participent est une ambition légitime et un sujet de fierté. Leur confiance inébranlable face au feu roulant des critiques et aux perspectives incertaines est dans une large mesure une énigme ; toutefois – raison majeure de cette assurance – ils sont conscients, pour avoir pris une part active à ce programme, que rien n’a été laissé au hasard. Les moyens et méthodes scientifiques les plus modernes ont été mis en oeuvre pour le calcul et le contrôle des paramètres relatifs à la construction et aux performances.
Les constructeurs de Concorde Sud Aviation et la BAC, et les compagnies aériennes qui ont passé des options, notamment Air France, la BOAC, Pan American Airways, procèdent actuellement à des travaux de recherche opérationnelle ainsi qu’à des études visant à planifier et à évaluer l’économie d’exploitation de l’appareil. La principale objection formulée par les opposants au programme Concorde porte sur les coûts sièges-kilomètres qui, selon leurs estimations, seront plus élevées que sur les avions de transport à réaction actuels. Toutefois, ces critiques ne tiennent pas compte du fait que l’objectif des compagnies aériennes n’est pas seulement d’assurer un bon service à bon marché, mais surtout de répondre aux multiples exigences du public. La réduction de moitié de la durée de vol sur l’Atlantique-Nord intéresse au premier chef de nombreux usagers, même au prix d’une légère augmentation des tarifs. Ceux qui n’y consentiront pas trouveront certainement place sur les appareils subsoniques.
Aux usines BAC de Filton, le simulateur de vol du Concorde a été utilisé dès le stade des travaux d’étude pour obtenir des informations sur le pilotage de l’appareil dans les différentes phases du vol. La société Sud-Aviation possède un équipement similaire, dont le programme de travail est coordonné avec celui qui est mené à bien en Grande-Bretagne.
Le président de la BOAC, Sir Giles Guthrie, client particulièrement difficile des constructeurs, a déclaré au cours d’une conférence de presse sur le Concorde, tenue le 11 décembre 1976 : nous étudions la possibilité d’utiliser le Concorde pour relier l’Europe à l’Asie par les régions arctiques quasiment inhabitées ; le trajet Londres-Tokyo pourrait ainsi s’effectuer en 10 heures et demie environ par la Terre de Baffin (Frobisher) et les Aléoutiennes (Cold Bay), alors qu’avec le Boeing 707, la liaison Grande-Bretagne-Japon par les Indes nécessite actuellement 25 heures.
On voit ici un réseau de lignes aériennes étudié par British Aircraft Corporation pour l’exploitation du Concorde. Grâce à une programmation de calculateur spécialement mise au point, les ingénieurs de la BAC peuvent effectuer des analyses de route complètes pour l’ensemble des vols, y compris ceux qui nécessitent des profils particuliers à cause du bang sonique
Le point de vue des compagnies.
Alors que le remplacement des avions à moteurs à pistons par des avions à turbo-réacteurs n’a été qu’une étape normale du développement de l’équipement aéronautique, la mise en service du TSS représente un progrès décisif et un principe radicalement nouveau qui se traduira peut-être pour les usagers par une augmentation des tarifs. Les exploitants devront, d’une part, assurer la meilleure exploitation possible de ce nouvel appareil en délimitant les nouveaux marchés et en déterminant leur importance, d’autre part l’intégrer au domaine d’exploitation subsonique. En outre, il devra être affecté à la desserte des itinéraires où il sera tiré le meilleur parti de ses avantages et où les problèmes techniques liés à son exploitation seront le plus facilement résolus.
L’augmentation éventuelle des tarifs en avion supersonique pourra prendre diverses formes : un supplément représentant un pourcentage des tarifs des avions subsoniques, un tarif TSS spécial, sans variation saisonnière et sans possibilité de réduction, ou simplement une taxe spéciale d’embarquement. Si le trafic supersonique exerce sur l’usager un attrait particulier, distinct de celui du trafic subsonique, l’intégration au trafic normal des compagnies aériennes sera simplifié et le TSS conservera sa valeur sur le plan commercial.
Son exploitation posera des problèmes particuliers, tant économiques que techniques. Le niveau élevé du prix d’achat et des frais d’exploitation nécessitera une utilisation d’autant plus poussée que les flottes seront plus réduites. Il en résultera une certaine difficulté concernant l’intégration du TSS au domaine d’exploitation des compagnies, le nombre très réduit, voire l’absence d’appareils en réserve, ne permettant pas de pallier la mise hors service d’un TSS ou les retards éventuels ; les passagers utilisant le TSS pour gagner du temps accepteront difficilement les départs et les arrivées tardifs et seront peu disposés à prendre un avion subsonique.
L’utilisation poussée implique une durée minimum d’immobilisation au sol, les compagnies envisagent 30 minutes ; toutefois, pour éviter tout risque dû à l’échauffement du revêtement, les composants susceptibles d’être remplacés seront installés loin des zones de la cellule dont le refroidissement s’effectue lentement. Le nombre des équipements électroniques étant plus élevé sur Concorde que sur les avions à réaction actuels, il sera nécessaire d’utiliser des appareils de contrôle automatique.
L’effet défavorable des restrictions au trafic nocturne sur le coefficient d’utilisation a donné lieu à de nombreuses controverses. En fait se risque sera peut-être moins sensible que sur les avions moins rapides ; Concorde pourra effectuer deux aller et retour sur l’Atlantique-Nord sans contrevenir à la réglementation en vigueur à Londres ou à New York. A Londres, le nombre des vols est limité de 23 heures à 6 heures et le niveau de bruit de 23 heures à 7 heures. Un Concorde quittant Londres à 10 heures arrivera à New York à 8h30, repartira de New York à 10h pour parvenir à Londres à 18h30. Le départ suivant pourrait avoir lieu à 2h30, l’heure d’arrivée à New York à 20h ; après deux heures et demie d’immobilisation au sol, soit à 22h30, l’avion repartirait pour Londres où il se poserait à 7 h. Cet horaire, assez souple, permet de compenser les retards éventuels.
En outre, il présente l’intérêt de grouper les départs et les arrivées aux heures les plus favorables ; toutefois, cet intérêt donnera lieu à une surenchère commerciale accrue, avec, tant dans l’espace qu’aux aéroports, la même saturation que l’on constate de nos jours. La solution consisterait, semble-t-il, à répartir les avions sur différents itinéraires, par exemple New York-Londres-New York-la côte ouest des Etats-Unis-New York. Cette solution semble peu probable car l’on ignore encore si le survol des régions habitées par les avions supersoniques sera autorisé. La plupart des exploitants envisagent deux types de projets correspondant à deux hypothèses : la limitation des vols supersoniques aux régions maritimes et aux zones à faible population ou l’absence de toute restriction. Le bang sonique causé par Concorde atteindra au maximum 7,3 à 9,3 kg/m2 et jusqu’à 12,2 au cours de l’accélération transsonique.
L’exploitation parallèle du TSS et des appareils subsoniques aura pour effet secondaire de reporter sur le trafic supersonique une partie de la clientèle de première classe, ce qui entraînera une réduction des recettes sur les avions subsoniques, partant de la rentabilité. Pour faire face à ce problème, les compagnies devront témoigner d’une ingéniosité accrue et il n’est pas inconcevable que les avions subsoniques soient retirés des longs itinéraires lorsque le TSS s’y implantera définitivement, probablement pas avant la seconde génération toutefois.
L’exploitation en vol.
Conjointement avec la BAC et Sud Aviation, Air France et la BOAC consacrent depuis de nombreuses années des études à Concorde ; en 1965, ces deux compagnies ont invité Pan American Airways à se joindre à elles pour définir l’avion de série. C’est probablement la première fois que trois grandes compagnies unissent leurs efforts pour normaliser le poste de pilotage, les équipements de navigation et les systèmes d’un avion ; le résultat de leurs travaux a été approuvé début 1967 par les autres compagnies qui ont passé des options pour Concorde.
Cette coopération entre constructeurs et acheteurs a eu pour effet de modifier les spécifications de Concorde pour le rendre compatible avec les impératifs de l’exploitation courante. Ses dimensions ont été sensiblement agrandies depuis qu’à commencé l’étude des prototypes, les travaux auxquels se sont livrés les compagnies ayant fait apparaître la nécessité de prévoir des réservoirs plus grands pour garantir les liaisons sans escale entre l’Europe et l’Amérique du Nord. Le carburant embarqué doit en effet couvrir les besoins du vol et les réserves, la descente aux instruments, le déroutement éventuel vers un aéroport de dégagement et une attente de 30 minutes au-dessus de cet aéroport, avant un atterrissage effectué entièrement aux instruments.
En liaison avec les responsables du contrôle de la navigation aérienne, six routes réservées aux avions supersoniques sont d’ores et déjà envisagées sur l’Atlantique-Nord, entre le sud de l’Irlande et Nantucket. L’espacement latéral prévu est de 96 kilomètres (60 milles), compte tenu du système de navigation à inertie dont sera équipé le Concorde. A son altitude de croisière, à partir de 15.000 mètres environ, Concorde volera bien plus haut que les appareils subsoniques.
Conformément aux procédures de contrôle actuelles, c’est de préférence à la montée en croisière proprement dite, la classique montée en croisière échelonnée qui sera utilisée, à savoir la montée à un palier supérieur lorsque la réduction du poids résultant de la consommation du carburant le permet. L’accélération transsonique est un autre problème pour le contrôle de la circulation aérienne. Pour assurer la meilleure utilisation possible du carburant, cette phase doit se dérouler de manière ininterrompue, l’avion suivant une trajectoire rectiligne sans limitation quelconque de l’altitude de la part des services du contrôle de la circulation aérienne. De nouveaux radars sont actuellement à l’étude, en vue d’assurer la couverture complète de la portion d’espace susceptible d’être franchie au cours de cette phase du vol.
Vol type.
Les passagers embarqueront à Londres ou à Paris à midi, par exemple, et arriveront à New York à 10 h 30 après avoir déjeuné à bord. L’équipage sera astreint avant le départ aux mêmes formalités que de nos jours : examen des prévisions météorologiques, vérification du plan de vol et de la quantité de carburant embarqué, contrôle des divers équipements de télécommunication, de navigation et autres systèmes.
Concorde décollera sur une distance plus courte que le Boeing 707 et n’aura donc pas besoin de piste spéciale. Le poids au décollage sera de 170,5 tonnes environ, avec 125 passagers assis par rangées de quatre, et la poussée totale au décollage des quatre réacteurs Olympus 593 sera de 63,5 tonnes. Les passagers seront particulièrement sensibles à l’accélération et remarqueront que le cabrage au décollage est plus important que sur les avions à réactions actuels, ceci pour permettre à l’aile delta de développer toute sa portance. Les avions subsoniques contemporains possèdent des dispositifs hypersustentateurs, comme les volets et les becs de bord d’attaque, pour améliorer les performances au décollage et à l’atterrissage ; Concorde, avec son aile en delta de 358 m2, n’a pas besoin d’hypersustentateurs. Après le décollage, le pilote entamera la montée suivant une forte pente afin de minimiser le bruit dans le voisinage de l’aéroport, rentrera le train et réduira la poussée des moteurs au niveau normal pour la montée. Le nez basculant et la visière, qui étaient en position basse pour améliorer la visibilité pendant le décollage, seront relevés afin de réduire la traînée. La visibilité vers l’avant restera néanmoins excellente.
Concorde sera plus bruyant au décollage que les avions de transport à réaction actuels, mais moins bruyant à l’approche qu’un Jumbo Jet équipé de réacteurs à double flux. Le problème du bruit est secondaire, car lors de la mise en service de Concorde, il n’y aura pas de prescriptions légales concernant le niveau de bruit pour l’obtention du certificat de navigabilité.
A 1200 mètres d’altitude, l’appareil accélèrera rapidement pour atteindre la vitesse normale en montée de 400 noeuds et le pilote demandera l’autorisation de monter, sous contrôle radar, jusqu’à l’altitude intermédiaire de 9000 mètres environ. Jusque-là Concorde suivra la procédure en usage de nos jours à cette différence près que la montée se fera plus rapidement. Arrivé à ce niveau intermédiaire, Concorde atteindra Mach 0,93 soit 70 noeuds de plus que les autres avions, et demandera l’autorisation de prendre une voie aérienne réservée au trafic supersonique. L’autorisation reçue, il poursuivra sa montée et entamera la phase d’accélération transsonique. Pour cela, le pilote augmentera la poussée et, si nécessaire, allumera la réchauffe. La réchauffe utilisée sur Concorde permet un accroissement de poussée de 9% environ ; elle n’a donc rien de comparable au système de postcombustion des avions militaires. Pendant cette phase du vol, l’appareil atteint 590 noeuds à 9000 mètres, 820 noeuds à 12.000 mètres et 1130 noeuds (Mach 2) à 15.000 mètres.
L’appareil est mis en palier entre 15.000 et 16.700 mètres d’altitude et commence son vol de croisière. Au cours de l’accélération transsonique, le centre de poussée aérodynamique de l’aile se déplace vers l’arrière ce qui conduit à modifier le centrage de l’avion avant d’aborder le vol supersonique. Cette modification de centrage s’effectue grâce à un système de transfert de carburant. La navigation sur les voies aériennes supersoniques est assurée automatiquement grâce à trois plateformes gyroscopiques indépendantes. Chaque système fournit les informations de cap, de durée de vol et de distance pour atteindre un point donné et donne au pilote automatique les signaux de changement de cap nécessaires pour suivre la trajectoire désirée. Vers le début des années 1970 les avions garderont le contact avec les stations au sol par l’intermédiaire de satellites de télécommunications. Les informations de position établies par le système de bord seront transmises automatiquement, par l’intermédiaire du satellite, aux calculateurs des centres de contrôle de la circulation aérienne.
Profil de vol calculé pour l’utilisation du Concorde sur la ligne Londres-New York. Le vol à vitesse supersonique, prévu ici en croisière ascendante, pourrait avoir lieu dans la pratique suivant la méthode des paliers successifs pour faciliter le contrôle du trafic aérien.
Les réponses de Concorde aux turbulences atmosphériques seront meilleures que celles des avions de transport à réaction en service de nos jours. Les turbulences en cours d’accélération posent plus de problèmes que les turbulences en croisière car tout obstacle empêchant l’avion d’atteindre rapidement sa vitesse de croisière provoque une consommation supplémentaire de carburant. Les détecteurs de turbulences en air clair qui sont actuellement à l’étude constitueront une aide appréciable pour le vol supersonique, mais ils ne seront pas disponibles à l’époque où Concorde entrera en service. Grâce à ses deux radars météorologiques à longue portée et à un dispositif d’alarme automatique, Concorde pourra éviter les systèmes nuageux en vol de croisière.
On sait que les éruptions solaires provoquent une augmentation du taux de radiation ; au moment critique, il suffira de réduire l’altitude d’environ 1500 mètres pour obtenir une protection suffisante. Un détecteur de radiations, susceptible d’alerter l’équipage, est d’ailleurs en cours de mise au point. Des concentrations importantes d’ozone, dépassant le minimum tolérable pour l’organisme, sont présentes aux altitudes de croisière de Concorde. Mais l’ozone se dissocie en oxygène normal à 300°C. Il sera donc détruit au passage dans les compresseurs qui fournissent l’air de conditionnement ; la purification sera complétée, si nécessaire, par des filtres catalytiques.
A 500 kilomètres environ de New York, alors que l’appareil vole à 18.000 mètres d’altitude à la vitesse de 2000 km/h, le pilote reçoit l’autorisation de descendre ainsi que les instructions du centre de contrôle de New York. La descente et la décélération sont conformes à la procédure normale, le vol subsonique commençant à partir de 12.000 mètres. Concorde se comporte ensuite comme n’importe quel avion subsonique à réaction ; sa vitesse sur circuit d’attente et en approche est la même que celle du Boeing 707.
11 – Analyses de route au moyen d’un ordinateur.
Pour étudier les divers problèmes d’exploitation du courrier supersonique Concorde, les Engineering Computing Services (Operational Research Group) et le Sales Department de la British Aircraft Corporation ont élaboré une programmation de calculateur appelée Airline Operations Simulation Model. Il s’agit d’un procédé mis au point par MM. Jean Marchand et John E. Iles sous la direction de M. Pat Burgess. Un ordinateur IBM 360 modèle 50 remplace à l’heure actuelle l’équipement English Electric KDF9 utilisé initialement.
Les travaux dans ce domaine ont été entrepris il y a un an et demi dans le but de recueillir des informations sur le degré de disponibilité et la rentabilité des avions en ligne. Les premières analyses portaient sur l’exploitation d’avions subsoniques comme le Boeing 707 et le Vickers VC 10, pour lesquels on se basait sur des retards au décollage pour des raisons techniques (dans 3 à 6% des cas) ainsi que sur d’autres retards dus aux conditions atmosphériques, aux formalités de douane, etc. Les résultats obtenus, qui correspondaient dans l’ensemble à ceux qu’avaient effectivement enregistrés les compagnies Quantas et BOAC, prouvaient que la programmation de base pouvait parfaitement se prêter, avec de nouvelles données, à des études plus complexe sur le vol à vitesse supersonique.
Le bang sonique et les horaires.
A l’aide de l’Airline Operation Simulation, les spécialistes de la BAC ont étudié, en prenant Londres comme point de départ, les répercussions sur les horaires des procédures anti-bang.
L’installation de calcul permet de simuler la mise en oeuvre d’une flotte d’avions complète sur un réseau déterminé. Les informations statiques sur les retards ayant des causes non techniques y sont introduites au hasard pour l’heure de décollage et l’heure d’atterrissage, cette dernière reflétant les retards pris en vol. On introduit ensuite les données statistiques recueillies par la société BAC elle-même concernant les retards dus à l’indisponibilité des appareils au moment du départ. Pour les analyses, on suppose que des retards plus ou moins importants se produisent pour des raisons techniques dans 4% des cas.
La programmation de l’ordinateur prévoit en outre deux jours pour les opérations d’entretien toutes les 550 à 650 heures de vol. D’autre part, cette programmation est fondée sur le principe de l’utilisation des appareils sur n’importe quelle ligne du réseau. En d’autres termes, le premier avion revenant à Londres serait le premier à repartir quelle que soit la destination du vol ce qui devrait également réduire les retards sur l’horaire.
Les informations figurant dans les deux tableaux ci-dessous sont des résultats d’analyse qui portent sur :
– Tableau 1. Un horaire prévoyant pour une flotte d’appareils Concorde cinq vols par semaine vers l’est, à destination de Sydney, sans utilisation d’une procédure spéciale anti-bang.
– Tableau 2 – Le même horaire pour le même nombre d’appareils, avec croisière anti-bang lors du survol de certaines zones.
Les renseignements sont donnés dans chaque tableau pour une période d’exploitation d’un an. On considère que les annulations de vol (première indication dans les tableaux) ne s’imposent à Londres que si le retard excède 24 heures.
Les tableaux font ressortir en outre que les procédures anti-bang n’entraînent aucune annulation de vol, bien qu’elles se traduisent par une augmentation du temps de vol pour chaque appareil et qu’il soit plus difficile de rattraper le retard écourtant les opérations d’escale.
L’analyse indique ensuite le nombre des arrivées et des départs conformes et non conformes à l’horaire, avec les taux (%) et les décalages moyens (minutes) correspondants. Les renseignements suivants donnent une idée de la fréquence à laquelle les appareils se posent après la clôture des opérations d’enregistrement ; on voit que cela se produit 17 fois à Sydney en cas d’utilisation des procédures anti-bang. Avec ces procédures, le temps moyen d’utilisation des appareils passe de 3678 à 4478 heures, ainsi qu’en témoignent les derniers chiffres figurant dans les tableaux.
Quelques étapes dans la réalisation de Concorde