Commandé maintenant à 47 exemplaires (grâce à la récente décision de la Sabena, qui devient ainsi la dixième compagnie à avoir choisi le supersonique franco-britannique), « Concorde » respecte le calendrier que lui ont fixé les gouvernements et constructeurs : Sud Aviation, BAC, Bristol Siddeley et la SNECMA ; le dessin du prototype est en effet gelé, maintenant d’une façon définitive, et les premiers vols restent fixés au début de 1968. Les caractéristiques de l’appareil sont les suivantes : envergure, 25,5 mètres ; longueur totale, 56,2 mètres ; surface de la voilure : 358,25 m2 ; poids au décollage : 148 tonnes ; à l’atterrissage : 31 tonnes ; carburant utilisable : 79 tonnes ; la vitesse de croisière maximale est de 2330 km/h, et la distance franchissable avec la charge marchande maximale, soit 11,8 tonnes, est de 6700 km (réserves FAA). Les longueurs de pistes nécessaires, enfin, sont de 2900 mètres au décollage, et 2300 mètres à l’atterrissage. Ces performances calculées correspondent à ‘utilisation de réacteurs Olympus 593-B de 15,9 tonnes de poussée unitaire.

Cependant, au récent meeting de Toulouse, il fut révélé que les appareils de série bénéficieraient d’une capacité de transport accrue, et d’une rentabilité améliorée. La nouvelle version envisagée transportera en effet plus de 230 passagers, grâce à un fuselage allongé de 3 mètres. Les modifications correspondantes de l’appareil n’interviendront qu’au stade de la présérie, et ne retarderont pas le délai de certification et la date de mise en service : 1971.

Les constructeurs doivent publier prochainement les nouvelles caractéristiques de ”Concorde ». Il est cependant certain que celles-ci resteront dans l’enveloppe admise jusqu’ici pour que l’appareil ne dépasse pas les limites admises pour les plus gros avions subsoniques actuels ; en clair, cela signifie que le ”Concorde » dernière version, ne devrait pas peser plus de 154 tonnes, et se contenterait des pistes déjà en service, soit une longueur nécessaire de 3200 mètres, au décollage (2400 mètres, à l’atterrissage).

Enfin, afin de satisfaire les objectifs de certaines compagnies aériennes, Sud Aviation et la BAC ont mis à l’étude une version moyen-Courrier, capable de transporter un nombre de passagers encore accru.

USA : les études se poursuivent

Avant de déterminer les caractéristiques de base de leur futur avion de transport supersonique, les Américains n’hésitent pas à accumuler des milliers d’heures d’essais en soufflerie, allant même jusqu’à utiliser des maquettes géantes, de taille supérieure à celle de maints avions. Sur cette photographie prise récemment dans la soufflerie d’Ames (dimensions de la veine : 24,4 x 12,2 mètres). On peut remarquer les dimensions impressionnantes de cette maquette à géométrie variable du Boeing 733 : 16,5 mètres de longueur, 10,15 mètres d’envergure, 6,4 tonnes de poids total.

Le Boeing 733 doit transporter plus de 200 passagers à 3000 km/h ; on note cependant que les USA n’ont toujours pas pris de décision sur un éventuel choix entre le projet Boeing et le projet Lockheed 2000 : peut-être même décideront ils de continuer les deux. D’autre part, la vitesse envisagée à l’origine, c’est-à-dire Mach 3, est maintenant abaissée à Mach 2,6/2,7, ou même moins, les problèmes de matériaux (structure et réacteurs) restent en effet ardus à résoudre.

Premiers détails sur le train d’atterrissage de Concorde

Parmi les nouveaux équipements dont il sera question au Salon du Bourget, le train d’atterrissage de Concorde sera évidemment l’un des plus intéressants. C’est la première fois, en effet, que nos spécialistes : Messier, pour le train avant, Hispano-Suiza, pour le train principal, sont appelés à étudier et à réaliser le train d’atterrissage d’un avion de 150 tonnes ultramoderne et les solutions adoptées ne manqueront pas d’être examinées par les techniciens de cette difficile spécialité.

Le train avant

Messier expose la maquette réalisée en vue d’effectuer les essais préliminaires indispensables à la mise en fabrication des prototypes. Ce train avant a été étudié sous l’optique de la légèreté, du faible encombrement, de la tenue, en température et en fatigue, de la sécurité de sortie même en cas de panne totale des circuits hydrauliques et électriques.

La géométrie générale de l’avion exige un train avant d’une longueur supérieure à 4 mètres. Malgré cela, le poids de l’ensemble, équipé de ses roues et de ses pneus, sera inférieur à 0,5% du poids de l’avion au décollage (soit moins de 740 kilos pour un poids total de 148 tonnes). Ce résultat a été obtenu grâce à la longue expérience de Messier et à l’emploi d’aciers 35NCD16 à haute résistance (utilisés par la société depuis plus de dix ans, en particulier pour la série de plus de 500 trains de Mirage III). Les températures d’emploi varieront entre – 60°C et + 140°C.

La jambe élastique du type direct est équipée de deux roues en diabolo. Etudiée pour occuper en position rentrée le minimum de volume et perturber le moins possible les formes du fuselage pressurisé, elle est contre ventée latéralement par un système de barres qui s’articule et se fixe sur la structure de l’avion. L’amortisseur est incorporé à la jambe et comporte une course de 500 mm.

La commande de direction est constituée par un ensemble indépendant boulonné sur la jambe et comporte un vérin de commande à crémaillère, contrôlé par un dispositif électro-hydraulique double (normal et secours).

Avant le relevage, le rappel dans l’axe des roues est assuré mécaniquement par la détente de l’amortisseur. Le vérin de direction assure également la fonction anti-shimmy. (La liaison en rotation des deux roues du diabolo limite le risque de shimmy). Pour les manœuvres au sol, le braquage des roues peut être aug­menté en désacouplant les compas. Un verrouillage annexe du vérin contrefiche évite tout escamotage accidentel.

Le relevage de la jambe vers l’avant est obtenu par action de deux vérins parallèles, freinés à chaque extrémité de leur course pour éviter tout choc lors des verrouillages haut et bas. L’accrochage de l’atterrisseur escamoté s’effectue sur un verrou automatique fixé sur la structure de l’avion. Le contreventement train bas est assuré par une barre télescopique et complété par un verrouillage de parking. La sortie peut être assurée en dernier ressort par l’action conjuguée de la gravité et des efforts aérodynamiques.

Cette conception répond à une clause exigeant la sortie et le verrouillage en toutes circonstances y compris en cas de non sortie des atterrisseurs principaux. Les matériaux ont été choisis dans la triple optique de la légèreté, de la tenue à la chaleur, de la tenue en fatigue. Leur couplage a été prévu de façon que les assemblages soient insensibles aux dilatations ou contractions.

Le train principal

Chez Hispano-Suiza, l’atterrisseur principal a fait l’objet d’une étude orientée dans le sens « Minimum de masse pour un maximum de sécurité“; Concorde impose en effet à tous ses composants structuraux des conditions particulièrement exceptionnelles. Des problèmes importants de température et de fonctionnement ont conduit au choix d’une version d’atterrisseur tout acier à haute résistance (186 hbar).

La géométrie et le dimensionnement extérieur de l’atterrisseur à boggie ont été définis d’une part en fonction de l’angle de cabré à l’atterrissage, imposant une hauteur de train de 3500 mètres entre l’axe d’articulation et l’axe du boggie, et d’autre part en fonction de l’emplacement réservé dans la structure avion. L’énergie verticale, à l’atterrissage, est absorbée par l’ensemble élastique comportant des pneumatiques de dimension 45 X 15,75 – 21”, un amortisseur principal à deux chambres et deux amortisseurs de tangage. Ces derniers ont également pour but d’assurer la souplesse au roulage de l’appareil. Le contreventement latéral de la jambe en position «train sorti» est assumé par une contrefiche télescopique à verrouillage interne mécanique type “Caravelle ». Cette contrefiche, déverrouillée hydrauliquement n’intervient pas lors de la rentrée du train. Enfin, la cinématique de la jambe du train, par le choix judicieux d’un système ”bielle levier », permet, pendant la manœuvre, de bénéficier au maximum du travail fourni par le vérin de relevage, réalisant ainsi une rétraction relative de 400 mm entre les positions « train sorti » et “train rentré“.